4G, 4G+, 5G : pourquoi cette course aux débits toujours plus rapides nous dépasse
Ce matin Bouygues Telecom annonçait la mise en place d’un débit encore plus rapide que la 4G+. Orange annonçait il y a quelques mois qu’il travaillait déjà sur le réseau 5G. Plus généralement, les opérateurs travaillent d’arrache pied pour se distinguer avec un réseau 4G toujours plus étendu. Des débits toujours plus rapides pour, selon eux, offrir aux utilisateurs des performances dont ils ont besoin.
Mais est-ce vraiment un besoin ? Cette question, beaucoup d’entre vous se la posent. Et c’est bien légitime. Nous avons l’étrange sensation que l’on peut encore faire mieux. Oui mais pourquoi ? Ces débits toujours plus rapides, est-ce vraiment un besoin des utilisateurs, une évolution nécessaire pour coller à nos usages ? Ou est-ce un argument marketing des opérateurs pour se distinguer de leurs concurrents ? Nous allons tenter d’analyser pourquoi cette course aux débits toujours plus rapides nous dépasse.
La 4G est méconnue et a déjà du mal à convaincre
Les opérateurs lancent déjà la 4G+ dans certaines villes, testent la “4G++” et travaillent déjà sur la 5G. Mais pour les utilisateurs français, la 4G a déjà du mal à convaincre. Selon une étude réalisée par Ipsos à la demande de Prixtel datant de fin septembre 2014, 50% des français ne voient pas la différence entre la 3G et la 4G.
Certains chiffres démontrent bien que les utilisateurs ont du mal à adopter la 4G, pire, ils ne savent même pas la définir. Ainsi, toujours selon cette étude, 17% des sondés ne savent pas ce qu’est la 4G (71% des 16-34 ans et 61% des 35-75 ans savent ce que c’est).
Des chiffres qui illustrent bien qu’après plus d’un an de mise sur le marché, la 4G n’a pas su convaincre les utilisateurs français. Les opérateurs ont beau vanter les mérites de ce réseau super rapide, les utilisateurs, eux, ne voient pas la différence. En tout cas pour la moitié d’entre eux. Et pour cause, ils ne voient absolument pas ce que ces débits super rapides leurs apportent en terme d’usage.
Des usages en décalage avec des débits ultra-rapides
Car si les opérateurs travaillent si dur pour imposer leurs nouveaux réseaux, c’est d’abord parce qu’ils cherchent à se démarquer de leurs concurrents et ainsi glaner des parts de marché, mais c’est aussi, selon eux, pour ne pas brider les utilisateurs dans leurs usages toujours plus intensifs de leurs smartphones.
Or, toujours selon l’étude Prixtel/Ipsos, 56% des sondés estiment que la 4G n’a rien changé à leurs usages. Alors que l’on pourrait s’imaginer que les contenus plus volumineux sont désormais davantage consultés il n’en est rien. 11% seulement des sondés regardent plus de vidéos qu’avant.
Même chose pour le surf sur le web, 32% seulement consultent plus internet sur leurs smartphones depuis la 4G. Parmi les détenteurs de smartphones, en moyenne, 33,4% des sondés surfent moins d’une heure par semaine sur le net avec leur appareil, 11,5% plus de cinq heures.
Parmi eux, il n’y a que 40% des utilisateurs qui voient une différence entre 3G et 4G pour cet utilisation. Autrement dit, en terme d’usage, la 4G n’a presque rien changé pour les utilisateurs français. En tout cas selon cette étude. Alors parler de 4G+ et de 5G semble bien loin de nos préoccupations.
La couverture réseau : le nerf de la guerre
A l’heure où l’on nous parle de ces débits toujours plus rapides, certains utilisateurs n’ont même pas une couverture convenable sur les réseaux existants. Qu'il s'agisse de la 3G ou de la 4G il y a encore des progrès à faire.
4G : un déploiement en décalage avec les promesses
Prenons la 4G, en partant du postulat que si les opérateurs travaillent sur la 4G+ et la 5G c’est que la 4G est au point. Le réseau 4G, en fait, n’est pas tout à fait au point. Après bientôt deux ans d’opérations marketing vantant les mérites de ce nouveau débit rapide, les utilisateurs ont du mal à trouver un réseau 4G digne de ce nom. Pourquoi ?
Parce que les opérateurs ont en quelque sorte mis la charrue avant les boeufs (ou ont vendu la peau de l’ours avant de l’avoir tué, c’est selon les goûts). Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free ont énormément communiqué sur ce nouveau réseau ultra-rapide avant même d’être sûrs de couvrir le territoire convenablement.
Certes, les opérateurs ont des délais pour étendre leur couverture petit à petit, avec des objectifs bien précis, en accord avec l’ARCEP etc. etc. Mais tout ceci ne regarde pas le consommateur. L’utilisateur lambda qui attend son bus avant sa journée de travail et qui voit une affiche annonçant la 4G sur 75% du territoire ne se pose pas de question de ce genre. Il lit bien “4G sur 75% du territoire”.
Sans viser un opérateur en particulier, Free communique sur sa 4G alors que l’opérateur ne couvrira que 25% du territoire avec son propre réseau qu’en octobre 2015. SFR est aussi très en retard par rapport aux promesses faites. Et ce qui semble être le plus incohérent dans tout ça c’est que certains utilisateurs ne peuvent même pas profiter d’un réseau 3G convenable.
Même la 3G n’est parfois pas au point
Que dire de la 3G ? La couverture est certes bien plus développée que pour la 4G mais là encore certains utilisateurs doivent se contenter du Edge ou du GPRS dans certaines zones. Un comble en 2015, à l’heure où l’on parle de 5G.
Et il ne s’agit pas forcément de zones rurales reculées. Il suffit de prendre la route pour s’apercevoir qu’il n’est pas rare de se retrouver avec un petit “E” près de l’indicateur du réseau sur nos smartphones.
Pas besoin de rouler sur des routes de campagnes, mais bien des autoroutes. Même en périphérie de grandes villes, il suffit parfois de s’éloigner de quelques dizaines de kilomètres pour ne plus avoir un réseau digne de ce nom.
N’y voyez pas là un acharnement, mais sur ce point, Free n’est pas au point par exemple. L’opérateur annonce des forfaits imbattables avec 20 Go de data en 4G, mais le problème, c’est non seulement que sa 4G se déploie à peine, mais en plus son réseau 3G n’est pas encore abouti. Car à cette heure 75% de la population seulement est couverte par le réseau de Free en 3G (on ne compte pas le partenariat avec Orange).
On prend l’exemple de Free mais on pourrait aussi parler des autres qui ne sont pas exempts de tous défauts non plus. Disons qu’ils ont l’avantage d’être plus anciens et donc gardent une longueur d’avance. Dans tous les cas de figure, on peut comprendre pourquoi entendre parler de 4G+ et de 5G peut parfois exaspérer certains utilisateurs.
Peu de smartphones compatibles
Cette course nous dépasse d’autant plus que nous ne sommes pas équipés d’appareils compatibles avec ces nouveaux débits. Nul doute que les constructeurs proposeront des smartphones compatibles mais pour le moment les appareils compatibles 4G+ sont très rares.
Et pas sûr que les utilisateurs suivront le rythme effréné imposé par les opérateurs et les constructeurs. Acheter un smartphone par an pour rester à la pointe de la technologie, ça n'est pas donné à tout le monde, loin de là. Aujourd’hui, selon une étude du cabinet Deloitte (octobre 2014), 71% des français n’ont ni smartphone ni forfait compatible 4G. Et 23% estiment qu’ils n’achèteront pas de smartphone compatible car ils sont trop chers. Alors la 4G+, inutile d'en parler.
Autrement dit, il y a un réel décalage entre les besoins des utilisateurs et le rythme imposé par les entreprises du secteur. A l’heure ou pour certains (11% selon l’étude Ipsos) 4G signifie 4 Go, les opérateurs communiquent déjà sur la 4G+ et la 5G.
- Pour en savoir plus : E, G, 4G, 3G, H+ : tout savoir sur la signification de ces lettres
En conclusion, cette course effrénée ne semble pas être menée pour les utilisateurs. Derrière ce discours du “d’ici un an ou deux vous aurez besoin de débits plus rapides” semble se cacher une toute autre stratégie.
Cette course ressemble plus à une guerre entre les opérateurs pour tirer leur épingle du jeu et justifier des tarifs plus élevés, pour assurer leur pérennité. Car, il faut bien l’avouer, l’arrivée de Free sur le marché a été la meilleure chose qui soit arrivée aux consommateurs, mais pas aux opérateurs.
Néanmoins, cette méthode semble déjà connaître ses limites. La 4G peine à convaincre et on nous parle déjà de 4G+ et de 5G. Les utilisateurs ne suivent déjà plus le rythme. Les opérateurs vont tellement vite que nous sommes complètement dépassés.