Bientôt une taxe copie privée sur les smartphones d’occasion ?
La taxe copie privée doit-elle être appliquée aux smartphones vendus sur le marché de l'occasion ? C'est en tout cas le souhait de la commission Copie Privée. Afin de compenser la baisse de la rémunération annuelle perçue par les ayant droits, la commission souhaite étendre le champs d'application de la taxe aux téléphones reconditionnés, aux feature phone et aux disques durs d'ordinateurs vendus séparément.
Entrée en vigueur en 1957, la taxe copie privée vise à compenser le préjudice infligé aux ayant droit. Cette taxe repose sur le principe que tous les titulaires de droit ont le monopole sur l'exploitation de leurs œuvres. Cependant, une exception à la législation sur les droits d'auteur prévoit que les personnes ayant acquis une oeuvre légalement sont libres de copier celle-ci sans l'accord du créateur. Concrètement, vous êtes libres de copier un CD, un fichier MP3, ou un film pour son utilisation dans le cadre privé. Pour compenser, les autorités ont mis en place une taxe sur les ventes de supports disposant d'un espace de stockage.
Cette taxe est perçue par Copie France, une société civile qui redistribue ensuite les compensations à ses membres. Au cours des dernières années, les compensations perçues par les ayant droits se sont amenuisées. En 2016, les titulaires se sont partagés 268 millions d’euros, contre seulement 260 millions en 2019. Avec la crise sanitaire, les ayant droit s'attendent à ce que le montant collecté via la taxe copie privée continue de fondre. En effet, ce montant annuel est directement lié aux ventes. La taxe copie privée est appliquée sur tous les produits importés en France. Avec la crise économique engendrée par les mesures de confinement, on s'attend évidemment à ce que les achats de smartphones, ordinateurs, tablettes et consorts s'effondrent.
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Une taxe sur les smartphones reconditionnés est en discussion
Pour compenser cette baisse, la commission Copie Privée, chargée d'établir les barèmes de la taxe, souhaite étendre son champ d'action, rapportent nos confrères de NextInpact. Au cours de la dernière réunion, la commission a soulevé l'idée de taxer les smartphones reconditionnés d'occasion. L'an dernier, 70% des recettes de Copie France étaient d'ailleurs générées par la vente de smartphones neufs. La commission y voit donc une façon de compenser les ventes en berne.
De facto, les smartphones reconditionnés seraient soumis à une double taxe : lors de vente et lors de la revente. L'espace de stockage intégré au téléphone est donc taxé à une double reprise, uniquement parce que l'appareil change de propriétaire. En mai dernier, Jean-Lionel Laccourreye, président du SIRRMIET, le Syndicat Interprofessionnel du Reconditionnement et de la Régénération des Matériels Informatiques, Électroniques et Télécoms, s'opposait déjà à l'idée d'appliquer la redevance aux produits du marché de l'occasion. “Si on assujettit les produits reconditionnés, le consommateur va payer deux fois cette redevance. Une fois sur le produit neuf. Une fois sur le produit d’occasion” argue Jean-Lionel Laccourreye.
Malgré tout, Copie France estime que cette double taxe est justifiée : “Copie France a constaté un fort développement du marché des appareils reconditionnés, notamment en ce qui concerne les supports assujettis à la redevance des smartphones et des tablettes. Son analyse juridique conduit à considérer que ces appareils donnent lieu à deux usages distincts par deux propriétaires différents, justifiant de ce fait que la redevance copie privée soit acquittée lors de leur revente”. La société civile demande donc aux spécialistes du reconditionnement de leur fournir des déclarations annuelles.
Et une taxe sur les feature phone
Ce n'est pas tout. La commission souhaite aussi imposer une taxe copie privée sur les feature phone, des téléphones ultra basiques qui se limitent aux fonctions essentielles (appels, SMS…), comme le Nokia 3310 lancé en 2017. Ces appareils sont généralement plébiscités par les personnes âgées pour leur facilité d'utilisation. Une taxe allant de 0,50 à 4 €, en fonction de l'espace de stockage des terminaux, a été évoquée.
Enfin, la commission ambitionne aussi de taxer les disques durs nus et les disques durs des ordinateurs portables et fixes. Pour l'heure, les discussions sont toujours en cours. Rien n'indique que le gouvernement décide finalement d'entériner la nouvelle source de rémunération des ayant droits. En effet, l'idée de la commission se heurte à la loi anti-gaspillage du gouvernement Macron. Cette loi cherche à réduire la pression fiscale sur les acteurs du marché de l'occasion et du reconditionné. Dans ce cadre, un allègement de la TVA est sur la table.
Source : NextInpact