SFR a incontestablement connu une année 2015 difficile. Le rachat par Numéricable et la nouvelle politique mise en place par Patrick Drahi a fini par lasser les clients de l'opérateur. La réduction des coûts c'est une chose, la qualité c'est autre chose. SFR semble avoir fini par le comprendre. Mais est-il déjà trop tard pour regagner le coeur de ses clients ?

Chez SFR, les clients grognent. Depuis le rachat de l’opérateur par Numéricable, rien ne va plus pour l’entreprise au carré rouge. Réseau en berne, service client incompétent, plaintes qui se multiplient, SFR a connu une année 2015 noire. Un juste retour de bâton ?

Patrick Drahi et sa politique de réduction des coûts

Depuis le rachat par Numéricable, la politique chez SFR est devenu un enfer. Patrick Drahi, a initié chez l’opérateur une stratégie reposant sur la réduction des coûts. Alors qu’il avait promis d’investir pour améliorer le réseau et la qualité de service lors du rachat, il a finalement commencé par réduire les dépenses.

En commençant par les investissements dans le réseau justement. La 4G attendra, tant pis pour les utilisateurs. En 2015, Free a réussi à dépasser SFR sur ce terrain alors que le quatrième opérateur est bien plus jeune et partait donc de bien plus loin.

Jérôme Yomtov, secrétaire général de l’opérateur, et acolyte de Patrick Drahi, s’est exprimé dans le magazine Capital du mois de janvier sur cette question. Selon lui, tout est la faute de Vivendi, le précédent actionnaire.

Dans les réseaux 3G et 4G, nous payons le prix du sous-investissement du précédent actionnaire. Il y a eu un trou d’air pendant deux ans avec la cession. Comme nous faisons beaucoup de travaux pour rattraper ce retard, la qualité peut être ponctuellement perturbée localement.

Ça c’est le discours de la direction. Car dans les faits, les investissements de l’ancien actionnaire ont été réduits de 10% à partir de Novembre 2014, soit quelques mois après le rachat en Avril 2015 de SFR par Numéricable. Patrick Drahi a de son côté gelé complètement tous les investissements dès son arrivée.

Il a alors mené une véritable guerre aux fournisseurs pour réduire les montants des factures, n’hésitant pas à tout mettre en pause, y compris les paiements, jusqu’à trouver un accord. SFR a ainsi réussi à réduire les factures de 10 à 15% mais pendant ce temps le retard s’est accumulé. C’est bien simple, SFR a déployé trois fois mois d’antennes que Free sur les 11 premiers mois de 2015.

Même au siège de SFR c’est la crise : les femmes de ménages doivent mettre les bouchées doubles, à Lyon les salariés de SFR sont privés de médecin du travail pendant plusieurs semaines parce que SFR ne le payait plus, à La Plaine Saint-Denis on retire les plantes des bureaux. Réduction des coûts on vous dit.

Une gronde jamais vue auparavant

Conséquences de cette politique de réduction drastique des coûts, la perte de 1,6 millions de clients pour SFR et une réputation qui n’est plus à faire. Même lorsque Free a créé un séisme sur le marché avec son offre mobile SFR n’a perdu que 700 000 abonnés, soit plus de deux fois moins.

Par ailleurs, jamais les plaintes contre l’opérateur n’ont été si nombreuses. Et pour cause, le réseau n’a pas été le seul secteur sacrifié par Patrick Drahi. Le service client a également vu sa qualité grandement baisser.

Avant son rachat, SFR avait délocalisé une partie de ses plateformes au Maghreb. Cette délocalisation avait dégradé la qualité du service client, certains conseillés éprouvant quelques difficultés à comprendre et se faire comprendre des clients. Qu’à cela ne tienne, dès son arrivée, Patrick Drahi a renforcé cette délocalisation en implantant en plus des plateformes au Portugal, à l’île Maurice ou encore à Madagascar.

Résultat : les clients sont furieux. Non seulement la qualité du réseau provoque des pannes à répétition mais en plus il leur est impossible de trouver un interlocuteur qui puisse répondre à leur problème. Certains ont alors contacté les associations de consommateurs comme UFC-Que Choisir, qui a également reconnu que les plaintes ne cessaient de se multiplier ces derniers mois. Les chiffres de l’ARCEP sont là pour confirmer. Entre les printemps 2014 et 2015 le taux de défaillances résolues en 48 heures est passé de 82% à 71% chez SFR.

2016 pour regagner le coeur des clients ?

Suite à cette année 2015 catastrophique et à la perte de 1,6 millions de clients, SFR a donc décidé d’attaquer 2016 sur de nouvelles bases. Il y a quelques mois, l’opérateur présentait la Zive Box, sa nouvelle box internet, la plus puissante du marché. Elle est ici pour relancer SFR sur le fixe et la fibre (câble). En prime SFR propose un concurrent de Netflix, baptisé Zive.

Lors de la présentation de cette nouvelle box, la direction a reconnu qu’un tel retard par rapport aux concurrents était inadmissible et qu’elle comprenait la grogne de ses clients. Faute avouée à moitié pardonnée ? Pas si sûr, et la direction le sait.

SFR l’a promis, 2016 sera l’année du renouveau. Fini les baisses drastiques de coûts, place à l’investissement. L’opérateur a commencé sa mise en route avec en décembre 2015 un déploiement d’antennes 4G supérieur à tous ses concurrents. Pourvu que ça dure.

Enfin, pour atteindre ses nouveaux objectifs, SFR a complètement remodelé sa direction. L’ancien PDG cède sa place et on devrait connaître le nouveau cette semaine. Suffisant pour regagner le coeur des clients ?