On a essayé Kingdom Come Deliverance 2, le jeu de rôle qui nous plonge en plein cœur du Moyen Âge. Voici nos impressions
Kingdom Come Deliverance 2 est un jeu vidéo historique qui se démarque par son jusqu’au-boutisme. Les équipes du studio Warhorse n’ont eu qu’un mantra : reconstituer le plus fidèlement possible le royaume de Bohème tel qu’il était en 1403. Un travail scientifique d’une grande rigueur qui cache aussi un jeu d’aventure prenant et exigeant. Nous avons pu y jouer quelques heures, voici nos premières impressions.
Lors de sa sortie en 2018, Kingdom Come Deliverance était alors une exception dans le paysage vidéoludique. Développé par des médiévistes passionnés, ce jeu de rôle/aventure en monde ouvert prenait soin de reconstituer une partie du royaume de Bohème tel qu’il était au début du XVe siècle. Au contraire d’un Assassin’s Creed qui utilise l’histoire comme un vaste parc d’attraction, KCD prenait soin d’être le plus fidèle possible au passé, et ce jusque dans les moindres détails. En 2024, le studio tchèque Warhorse revient avec un deuxième volet, sobrement intitulé Kingdom Come Deliverance 2.
Cet épisode reprend la recette de l’original, mais en poussant tous les curseurs à fond. Mécaniques améliorées, rythme mieux maîtrisé, monde plus vaste et surtout fidélité historique accrue, il veut surpasser ce qui a déjà été accompli. Nous avons pu y jouer, voici nos impressions après une petite dizaine d’heures.
Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître
Kingdom Come Deliverance 2 reprend l’intrigue là où on l’avait laissée à la fin du 1. Pas de panique, l’intro nous remet les événements importants en avant pour les nouveaux venus. Nous y incarnons toujours Henry, forgeron ayant gravi les échelons jusqu’à devenir le garde du corps du Seigneur Hans Capon, alias Sire tête à claques. Le scénario se déroule en 1403, alors que la guerre civile fait rage dans le royaume de Bohème (République Tchèque actuelle). A travers les yeux de notre protagoniste, nous vivons sa petite histoire qui permet de mettre en avant la grande.
Le véritable héros de Kingdom Come Deliverance 2, ce n’est pas Henry, mais la rigueur historique. Les développeurs ont fait preuve d’un sens du détail obsessionnel. Deux régions sont modélisées à l’échelle 1 :1 : les alentours de Troskovice que nous avons pu parcourir ainsi que Kutná Hora (Kuttenberg) qui se débloque plus tard. Un immense soin a été apporté à la modélisation des lieux, que ce soit dans les bâtiments présentés (les châteaux sont tels qu’ils étaient à l’époque), dans la structure des villages ou dans la topographie. On reconnaît même l’open world des régions du jeu sur Google Maps !
Un ouvrage colossal réalisé main dans la main avec des historiens ; les vêtements, les armes, les mœurs, l’urbanisme, tout a été pensé pour être le plus fidèle possible à l’époque présentée. Le sens du détail va très loin. Par exemple, les casques rouillent et il est impossible d'en enfiler un sans avoir au préalable mis une capuche rembourrée. On ne peut forger une épée sans garde ni pommeau. Les cabanes des tanneurs sont situées à la sortie des villages à cause de l'odeur. Toutes les informations transitent par les baillys ou les tavernes… Plus important encore : l'univers qu'on parcourt est chatoyant, avec des vêtements colorés tels qu'ils l'étaient à l'époque, prenant à revers le cliché du moyen âge gris et crasseux qu'on nous sert trop souvent. Qu’on soit médiéviste averti ou simple touriste virtuel, on a le sentiment que le monde qu’on arpente est cohérent et historiquement juste. Le tout est servi par un codex très riche qui explique tout ce qu’on voit dans nos pérégrinations, tel un manuel interactif.
Cette reproduction de la Bohème médiévale n’est pas seulement réalisée à des fins scientifiques, puisque derrière se cache un jeu de rôle dans lequel nous avons pu nous plonger quelques heures.
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Une simulation de vie qui n’hésite pas à bousculer les joueurs
Après un long tutoriel de quatre à cinq heures qui nous apprend les très nombreuses mécaniques, nous sommes enfin lâchés dans un monde ouvert aussi vaste que somptueux. Là encore, le réalisme est de rigueur. C’est bien simple : KCD2 a pour objectif de devenir l’immersive sim ultime, celui qui veut apprendre à ses joueurs ce qu’est vraiment de vivre au moyen-âge.
Comme dans le premier opus, le héros Henry doit gérer sa faim, ses blessures, son hygiène, sa fatigue et même son aspect. Ce n’est pas un gimmick, mais bien des mécaniques qui servent le propos. Un noble refusera de vous parler si vous puez le crottin et que vous êtes habillé en paysan. Vous serez moins adroit à l’épée si vous mourrez de faim. Voyager d’un village à l’autre en pleine nuit ? Mauvaise idée. Henry n’est pas un héros tout puissant. À tout moment, il peut tomber sur des bandits en surnombre ou se perdre dans la forêt jusqu’à tomber sur une meute de loups. Le game over est alors assuré.
Ces contraintes, paradoxalement, contribuent à donner une sensation grisante de liberté. C’est à nous de nous débrouiller avec ce qu’on a, lâché dans un monde hostile et simplement guidé par des quêtes vagues. Ira-t-on travailler auprès du forgeron ou du meunier pour se faire un peu de sous ? Comment on s'y prend pour s’habiller, manger, se reposer, ou convaincre tel PNJ pour une mission ? Même les déplacements représentent un défi : votre Henry utilisera-t-il ses jambes pour gambader une vingtaine de minutes dans la pampa ou volera-t-il un cheval, quitte à être recherché par la garde, afin d’atteindre le prochain village ? C’est à vous de voir parmi la myriade de possibilités. Un système incroyablement riche, mais qui pourrait décourager ceux qui ont l’habitude d’être guidés, de plus que le rythme de l’aventure s’avère extrêmement lent.
Que je trépasse si je faiblis
Kingdom Come Deliverance 2 reprend donc la recette du premier, en l’améliorant considérablement. Qu’on aime se perdre dans cet univers qui semble beaucoup trop grand pour nous ! Toutefois, tout n’est pas parfait, loin de là. On pense par exemple au système de combat, inspiré de l’escrime médiévale et toujours aussi obscur. La maniabilité s'avère très rigide. Les menus sont fouillis (mais magnifiques). Le système de gain de niveau peu intuitif… On déplore aussi une VF à la limite du sabotage ; certains dialogues nous sortent clairement du jeu, soit par l’acting déplorable, soit par les anachronismes comme des vulgarités à tout va. Vraiment dommage.
Le studio Warhorse veut livrer un titre jusqu’au-boutiste avec Kingdom Come Deliverance 2, aussi bien dans son respect de l’histoire que dans son gameplay. Un jeu séduisant, grisant, fascinant dans ses premières heures, qui ne prend pas la peine de tenir le joueur par la main. Les moins courageux décrocheront vite. En tout cas, nous avons été enthousiasmés par ce début d'aventure, par cette liberté et surtout par l’approche scientifique et terre à terre de son sujet. Nous brûlons de continuer notre périple et espérons que la formule ne s'étiole pas au fil des heures. Dernier point important : le premier épisode était sorti dans un état catastrophique, parasité par des bugs et des crashs. Sur notre préversion, nous n’avons constaté aucun souci particulier, ce qui laisse présager un titre peaufiné. Kingdom Come Délivrance 2 a toutes les cartes en main pour être un grand jeu.
Sortie le 4 février 2025 sur PC et consoles.