Affaire Huawei : les entreprises tech américaines souffrent aussi de la décision de Trump
L'affaire Huawei était censée ne viser que le fleuron de l'industrie chinoise ? La décision de Trump d'interdire aux entreprises américaines – ou utilisant des technologies américaines – de collaborer avec la marque a pour conséquence paradoxale de pénaliser les entreprises aux Etats-Unis. Skyworks, Qualcomm, Texas Instruments, Intel, en particulier subissent le plus durement les conséquences de la guerre commerciale. Mais d'autres, y compris Google et Microsoft, pourraient également être touchés à moyen terme.
Trump va-t-il à terme “rendre sa grandeur à l'Amérique” ou plutôt tuer les entreprises les plus performantes du secteur high-tech de son pays ? La question se pose, alors que la presse économique outre-atlantique commence à s'émouvoir des conséquences que la mise au ban de Huawei et la guerre commerciale que le pays mène contre la Chine commencent à avoir sur les entreprises américaines. Dernière victime : le fondeur Skyworks, spécialisé dans les modules de communication radio sur silicium.
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La guerre commerciale et l'affaire Huawei heurte aussi les entreprises américaines
Lors de l'annonce de ses résultats, mardi, on a appris que les revenus trimestriels de Skyworks étaient nettement inférieurs aux attentes – et que les prévisions pour les trimestres suivants avaient été revues à la baisse. Skyworks précise qu'il a du cesser ses ventes auprès de Huawei à la suite des mesures édictées par l'administration Trump : “Skyworks a cessé tous ses envois à Huawei et ses affiliés à la date où Huawei a été ajouté à la Liste des Entités et ne peut pour l'heure prédire quand ni si les envois vont reprendre”.
Skyworks pèse quelques 11,57 milliards de dollars de capitalisation. Depuis le début de l'affaire, l'action du groupe a déjà perdu 12% – cette annonce devrait encore creuser la défiance des investisseurs. Et Skyworks est loin d'être la première entreprise américaine (ni vraisemblablement la dernière) à souffrir de la posture prise par la Maison Blanche à l'égard de Huawei et de la Chine.
Le semi-conducteur américain, touché au coeur
CNBC (1) évoque ainsi le cas de Qorvo, qui fabrique des solutions radio et WiFi pour les appareils mobiles, Lumentum Holdings (composants optiques) ou Neophotonics (solutions fibre optique) – donc le succès était jusqu'ici en grande partie lié aux commandes de Huawei. Neophotonics en particulier, tire 46% de ses revenus de Huawei. Dans un autre article de CNBC (2) on apprend que les indices boursiers qui suivent les performances du secteur américain du semi-conducteur ont perdu beaucoup de valeur depuis le debout de l'affaire.
Ainsi, Direction Semiconductor Bull 3X Shares par exemple, un produit boursier dit “Exchange Traded Funds” (ETF) qui s'appuie en grande partie sur les performances de Qualcomm et de Texas Instruments, ont perdu plus de 34% sur le dernier mois. Un autre ETF qui base cette fois-ci son indice en grande partie sur les performances d'Intel a dévissé de 25%. De son côté le Nasdaq Composite (qui rassemble pour une large part les entreprises technologiques américaines du Nasdaq) a dévissé plus modestement de 7,4%.
Les conséquences de long terme ne semblent pas correspondre aux promesses de l'exécutif américain
Le président de HP Dion Wisler cité par CNBC a de son côté émis la crainte que les barrières douanières ne provoquent le chaos dans la chaine d'approvisionnement. Les analystes s'attendent par ailleurs à ce que d'autres acteurs majeurs de l'industrie voient leurs performances lourdement impactées à moyen et long terme – en particulier des entreprises au rayonnement international comme Google et Microsoft.
Et ce n'est pas tout : la Chine est en train elle aussi de mettre sur pied des mesures en guise de rétorsion. Le pays a mis en place une liste d'entreprises américaines qui ne sont pas “dignes de confiance”, et donc exclues de son marché. Le secteur technologique chinois se concentre par ailleurs à trouver ses propres solutions alternatives aux technologies américaines. Un effort à la fois couteux et chronophage – mais qui devrait à terme heurter durablement les performances des acteurs américains.
Quant au problème des emplois aux Etats-Unis – souvent rappelé par le président américain pour justifier sa guerre commerciale – il semble pour l'instant, comme le rappelle The Epoch Times que les firmes qui s'appuyaient sur des unités de productions en Chine cherchent à déplacer leur production dans d'autres pays d'Asie et en Inde, plutôt que de rapatrier des emplois aux Etats-Unis. Le signe, a minima, qu'il sera vraisemblablement compliqué d'analyser cette guerre commerciale en termes de gagnants et de perdants…
D'ailleurs, c'est peu ou prou ce que pense Herman Hauser le patron d'ARM pour qui les décisions de l'administration Trump seront sur le long terme “incroyablement dommageables pour Arm, Google et l’industrie américaine”.
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Sources : CNBC (1), CNBC (2), The Epoch Times