Bloctel : le Conseil d’Etat vient d’annuler la mesure anti-démarchage la plus efficace
Le système Bloctel n'est pas prêt de s'améliorer : le Conseil d'Etat vient d'annuler ce qui constitue sans doute la mesure la plus efficace contre le démarchage téléphonique : l'interdiction de s'identifier avec des numéros trompeurs. Le Conseil d'Etat estime que l'Arcep qui avait mis en place ces mesures, a agi au-delà de son champ de compétences.
Depuis août 2019, une série de nouvelles mesures limite l'activité des centres d'appels qui s'adonnent au démarchage téléphonique. Celles-ci tiennent surtout à la manière dont ces appels peuvent être identifiés par les usagers. Les centres d'appel qui s'adonnent à une activité de démarchage se doivent ainsi d'utiliser soit un affichage clair de leur identité, soit un numéro commençant par 08 – a fortiori lorsque ces derniers reçoivent moins d'appels qu'ils n'en émettent.
Les centres d'appels se sont ainsi retrouvés rapidement contraints de ne plus utiliser de numéros géographiques (01-05), mobiles (06-07) ou de box internet (09) histoire de clairement distinguer leur qualité d'entreprise. Or pour deux syndicats de la profession, AFRC (Association Française de Relations Clients) et le SP2C (Syndicat des professionnels de centres de contacts), ces mesures ont un impact trop lourd sur le secteur.
Les centres d'appel pourront continuer d'utiliser des numéros commençant par 01, 02, 03, 04 , 05 , 06, 07 et 09
Les usagers sont en effet moins susceptibles de décrocher lorsqu'un numéro commençant par 08 s'affiche. Les avocats des représentants du secteur ont rappelé que la filière emploie 56 000 personnes en France, et que le démarchage téléphonique “est un canal de prospection parfaitement légitime”. Et le Conseil d'Etat leur a donné raison. Dans sa décision, l'autorité estime que l'Arcep, à l'origine des mesures, n'était pas fondé à les mettre en place.
Le Conseil d'Etat rappelle en effet que seuls les ministres chargés de la consommation et de l'économie numérique ont ce pouvoir. Les juges ont également pris en compte les nouvelles obligations qui pèsent sur les opérateurs de ces centres. La loi du 24 juillet 2020 fixe en effet un nouveau cadre au démarchage téléphonique. Les opérateurs télécom ont désormais pour obligation de surveiller leur activité et de bloquer les appels commerciaux non conformes qu'ils proviennent de France ou de l'étranger.
“La décision a le mérite de délimiter clairement les champs de compétence entre l'Arcep, chargée de définir le plan de numérotation téléphonique et les ministres en charge de la consommation et de l'économie numérique qui fixent quels numéros peuvent être utilisés par les professionnels lorsqu'ils appellent les consommateurs”, explique Maître Géraud Mégret, avocat des syndicats de centres d'appel devant le Conseil d'État cité par le JDD.
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Et de souligner que “l'Arcep allait beaucoup plus loin que ce que prévoient nos voisins européens dans ce domaine”. La décision du Conseil d'Etat n'étant pas passible de recours, l'Arcep a désormais un délai de deux mois pour s'y conformer. Pour le consommateur, cela signifie donc le retour, dans une certaine mesure, des appels de démarchage en provenance de numéros de téléphone qui ne sont pas clairement identifiés comme ceux d'une entreprise.
Source : JDD