Bouygues Telecom lance une énorme campagne de recyclage des mobiles : coup de comm ou vrai engagement ?
Bouygues Telecom, le WWF France, Suez, Samsung et Recommerce s’associent pour une opération coup de poing de recyclage des mobiles. Du 9 au 21 octobre, vous pourrez déposer vos vieux téléphones et smartphones dans les boutiques de l’opérateur qui vous offrira une contrepartie financière. Le but : démocratiser le recyclage mobile encore trop rare en France.
Bouygues Telecom est parti d’un constat flagrant pour mettre en place cette opération. Selon un rapport du Sénat de 2016, 100 millions de téléphones portables pourrissent dans nos tiroirs. Le taux de collecte de ces smartphones non utilisés est de 15% seulement (150 000 modèles). Pour en avoir le coeur net, Bouygues Telecom a commandé une autre étude à Kantar TNS. Les résultats sont sans appel. 72% des français gardent leurs vieux mobiles, qu’ils soient cassés ou usagés. 57% les conservent “au cas où” explique Olivier Roussat, PDG de Bouygues Telecom.
Pourtant, toujours selon cette étude, 73% des français estiment que les matériaux présents dans ces vieux téléphones peuvent encore avoir de la valeur. 80% d’entre eux pensent que les recycler permettrait de limiter leur impact négatif sur l’environnement. Et nous sommes loin d’imaginer la gravité de la situation. Un chiffre vous fera sans doute bondir : pour fabriquer un iPhone il faut pas moins de 70 kg de matière. Un désastre pour notre écosystème explique Isabelle Autissier, présidente du WWF France.
Pour sensibiliser le grand public et créer de nouveaux réflexes, Bouygues Telecom, le WWF France, Suez, Samsung et Recommerce ont uni leur force. Ils sont tous d’accord sur un point : l’union fait la force. Du 9 au 21 octobre, ces partenaires lancent donc une opération de recyclage massive. Pour un jour peut-être recycler son mobile comme on trie aujourd’hui ses déchets.
Comment ça marche ?
Dans cette association tout à fait honorable, chaque acteur a un rôle bien défini. Bouygues Telecom s’occupe de la collecte. Dans toutes les boutiques de France, les français pourront déposer leurs vieux téléphones dans des urnes dédiées. Avant de déposer le précieux dans la boîte, les consommateurs pourront au préalable se rendre sur le site de Bouygues Telecom. Son partenaire Recommerce, spécialiste du reconditionnement y gère une page dédiée à l’évaluation de la valeur de votre vieux téléphone.
S’il s’agit d’un smartphone “pas si vieux” vous avez toutes les chances d’en tirer un bon prix. Vous pouvez également vous rendre en boutique pour que les conseillers procèdent à cette évaluation et reprenne votre smartphone pour un reconditionnement. Recommerce le remettra alors à neuf et le relancera sur le marché avec une garantie pour un prix plus abordable.
Si votre téléphone est trop vieux, Bouygues Telecom s’engage tout de même à vous offrir un bon d’achat de 10 euros à utiliser dans ses boutiques. Si vous avez un vieux Nokia 3310 complètement mort qui dort dans vos tiroirs, c’est le moment de le déposer. Pour ces modèles, c’est Suez qui s’occupe de la suite. Le téléphone va alors passer par une usine de recyclage de Suez en France (une centaine de salariés). Les composants dangereux seront séparés du reste de l’appareil (batterie, câbles). Ensuite, il passera par une étape de broyage et de triage afin de récupérer les matériaux comme le plastique et les différents métaux. Ils trouveront une seconde vie dans la fabrication de nouveaux terminaux.
C’est ce que fait Samsung pour certains de ses smartphones. Le plastique utilisé pour la fabrication du Galaxy S8 est à 20% recyclé. Un bon début reconnaît volontiers le Vice Président Mobilité de Samsung France, Jean-Philippe Illarine. Il précise toutefois que Samsung s’est engagé dans un processus d’éco-conception reposant sur trois piliers : une utilisation raisonnée des matériaux, un travail sur l’efficacité énergétique des produits et une prise de conscience générale auprès des consommateurs. Un discours à l’opposé de la stratégie de la marque qui inonde le marché de nouveaux produits chaque année. Mais l’effort est à saluer. D’autant que Samsung et ses partenaires mettent en jeu 50 Galaxy S7 Edge reconditionnés à gagner pour ceux qui joueront le jeu du recyclage.
- Plus d'infos sur le site officiel de l'opération.
Quid des données personnelles ?
L’une des craintes des consommateurs lorsqu’ils recyclent leurs vieux téléphones est la question des données personnelles. Sur ce point, Bouygues Telecom et ses partenaires se veulent rassurants. L’opérateur a mis en ligne un site qui explique comment supprimer ses données définitivement. Si les utilisateurs n’y parviennent pas d’eux-mêmes, les conseillers en boutique sont prêts à accompagner les utilisateurs dans cette démarche. Ils peuvent même transférer leurs données vers leur nouveau modèle avant la suppression. S’il s’agit de modèles Samsung, le coréen met à disposition une application baptisée Smart Switch qui permet très simplement de transférer les données de n’importe quel smartphone à un modèle Samsung.
Si le téléphone part en reconditionnement, Recommerce effectue un double contrôle de la suppression des données avec toutes les certifications possibles et imaginables. S’il part en recyclage les données sont tout simplement “broyées” explique Philippe Maillard, Directeur général France Recyclage et Valorisation de Suez. Pas d’inquiétude au niveau des données personnelles donc.
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Ne vaut-il pas mieux le revendre soi-même ?
La question qui revient souvent entre le reprise par un opérateur et la revente par ses propres moyens revient souvent. Les français sont friands de sites de petites annonces comme Le Bon Coin, sur lesquels on retrouve quotidiennement de nombreux smartphones. L’avantage de la revente en ligne est d’obtenir un prix plus intéressant que celui de l’opérateur. Est-ce vraiment le cas ?
Benoît Varin, co-fondateur de Recommerce Group, nous a expliqué les avantages de la reprise par un spécialiste du reconditionnement. Le premier est que le prix annoncé par le site de reconditionnement est fixe et assuré. Ce qui n’est pas le cas sur les sites de petites annonces. Bien généralement entre l’accord trouvé avec un particulier par email et le prix de vente final, il y a un écart. Une petite rayure, un petit défaut qui n’avait pas été vu sur les photos amène à de nouvelles négociations sur place et bien souvent à une nouvelle baisse de prix.
L’autre avantage est lié à la sécurité. Celle des données d’abord. Il n’est pas rare que certains consommateurs ne sachent pas supprimer complètement leurs données personnelles. Le propriétaire suivant peut alors se retrouver avec des photos personnelles, des informations bancaires ou tout autre information en lien avec la vie privée.
Le reconditionnement est également une sécurité pour l’acheteur. L’IMEI de chaque smartphone est enregistré, tracé. S’il est volé ou si tout autre problème se manifeste, la société de reconditionnement est tout à fait capable de venir en aide de l’utilisateur. Ce qui n’est absolument pas le cas d’un échange en mains propres. Combien d’utilisateurs n’ont pas vérifié sur place qu’un smartphone était bien débloqué tout opérateur et se sont retrouvés avec un modèle inutilisable ? Finalement si l’attrait des petites annonces semble financièrement intéressant, l’écart de prix n’est pas forcément intéressant aux regards de la sécurité.
- Lire aussi : La folie des smartphones reconditionnés en France
Et après ?
L’opération de Bouygues Telecom se déroule du 9 au 21 octobre. Mais après ? Après les différents partenaires feront le bilan. Opération de communication ? Non nous assurent les acteurs de l’opération. Le WWF France continuera d’être partenaire de Bouygues Telecom pour communiquer sur le recyclage. Les offres continueront d’exister après ces dates, comme elles existent depuis déjà longtemps.
Car tout cela n’est pas nouveau. Ce qui l’est en revanche, c’est le matraquage médiatique qui sera fait dans la presse et sur les réseaux sociaux pour une prise de conscience massive. Car le recyclage des produits électroniques est encore trop rare par rapport au rythme de sortie des nouveaux smartphones. D’ailleurs, nous avons interrogé les différents acteurs sur cette opposition entre renouvellement massif des smartphones et l’idée qu’il faut être plus responsable.
Si la prise de conscience commençait par un renouvellement moins fréquent ? Aujourd’hui les français renouvellent leur smartphone tous les 20 mois en moyenne. Or, il est tout à fait possible de les conserver pendant plusieurs années. La présidente de WWF France a fièrement déclaré qu’elle possédait son “smartphone depuis bientôt 7 ans”.
Nous en sommes donc venus à la question des besoins. Sur ce point, Bouygues Telecom et Samsung ont bien du mal à admettre leur part de responsabilité. Comment parler d’environnement et de recyclage lorsque l’on participe activement à une économie qui pousse les consommateurs à changer régulièrement de produit ? Face à cette question, Samsung et Bouygues Telecom font front commun : la technologie sur smartphone est très évolutive, “les consommateurs réclament toujours plus”.
Samsung et Bouygues Telecom ne feraient que répondre à une demande de plus en plus forte. Pas sûr que les utilisateurs soient d’accord. Nous serions plutôt partisans de l’hypothèse inverse : les constructeurs et autres acteurs du marché ont tendance à créer un besoin qui n’existe absolument pas. Qui a vraiment besoin d’un Galaxy Note 8 avec écran borderless ? Six mois après un Galaxy S8 avec écran borderless ? Même s’il reste encore beaucoup de chemin à faire voyons le verre à moitié plein et saluons la belle opération en place. Aux urnes citoyens !