Coronavirus : l’Europe utilise nos smartphones pour s’assurer que le confinement est bien respecté
Le coronavirus contraint l'Europe à prendre des mesures exceptionnelles. Pour gérer l'épidémie, la commission européenne a demandé à 8 opérateurs, dont Orange, de fournir les données de localisation des smartphones des abonnés pendant le confinement. L'opération vise à anticiper les pics épidémiques et adapter au mieux les offres de soin. Explications.
Ce lundi 23 mars, le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton s'est entretenu avec les dirigeants de plusieurs opérateurs télécoms européens, rapportent nos confrères du Monde. Parmi les opérateurs invités à la rencontre, on trouve Orange, Deutsche Telekom, Telia, Telenor, Telecom Italia, 1 Telekom, Telecom Italia et Vodafone. Avant la rencontre, Thierry Breton s'était tourné vers la GSMA, un consortium de 200 constructeurs et opérateurs, pour sélectionner un opérateur par pays.
Lors du meeting, le commissaire européen a demandé aux télécoms de fournir les données de localisation de leurs abonnés afin d'endiguer la propagation du coronavirus. Selon l'homme politique, ces données vont permettre aux épidémiologistes de mieux comprendre et d'anticiper la propagation du Covid-19. En clair, les données permettront aux autorités de vérifier si les mesures de confinement sont bien respectées par la population en Europe. Sur cette base, les chercheurs pourront anticiper les pics épidémiques.
L'objectif est “d’analyser la densité de population dans le temps pour voir le lien entre les mesures de confinement et la propagation du virus, avec comme objectif clair d’anticiper les pics de contamination” précise le cabinet de Thierry Breton dans un communiqué, relayé par le Monde. L'opération devrait surtout permettre aux hôpitaux de « dimensionner » l'offre de soins en fonction des régions. Contrairement aux dispositifs mis en place en Chine, en Corée du Sud ou à Taiwan, l'objectif n'est donc pas de repérer les individus contrevenant aux mesures de confinement pour imposer des sanctions.
Certaines régions d'Europe n'ont pas attendu Thierry Breton pour surveiller les déplacements de leurs habitants pendant le confinement. C'est le cas de la Lombardie, la région la plus touchée par l'épidémie en Italie. En France, un comité de chercheurs et de médecins planche actuellement sur une idée similaire, définie comme une “stratégie numérique d’identification des personnes”. Le but est de mieux cerner la propagation de l'épidémie. Jusqu'ici, le projet s'est heurté à la frilosité des édiles.
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8 opérateurs européens, dont Orange, acceptent de surveiller les déplacements des abonnés
Huit opérateurs européens ont rapidement répondu favorablement à la demande du commissaire européen : Orange (France), Telenor (Norvège), Telia (Suède), Deutsche Telekom (Allemagne), A1 Telekom (Autriche), Telefónica (Espagne), Telecom Italia (Italie) et Vodafone (Pays-Bas). Ces opérateurs partageront les données de localisation avec une groupe dédié à la commission européenne dans les jours à venir.
Thierry Breton assure que le projet n'enfreint pas les différentes législations en matière de respect de la vie privée, dont le Règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD). Les données de localisation générées par les abonnés seront en effet traitées à grande échelle de façon statistique. Agrégées en masse, les données ne seront pas liées à un identifiant permettant de connaître l'identité d'un utilisateur en particulier.
“Cela ne ressemble ni de près ni de loin à ce qui est fait en Chine ou en Corée, où les utilisateurs sont tracés à titre individuel ” souligne Thierry Breton. “Le but, c'est de savoir , par anticipation, comment les moyens hospitaliers doivent être dimensionnés et répartis” précise Stéphane Richard, PDG Orange, soulignant à son tour que le dispositif n'a rien à voir avec les mesures liberticides imposées dans certains pays étrangers.
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Néanmoins, le Contrôleur européen de la protection des données est rapidement monté au créneau pour mettre en garde Thierry Breton et les opérateurs, rapporte Reuters. “La Commission devrait définir clairement l'ensemble de données qu'elle souhaite obtenir et garantir la transparence vis-à-vis du public, afin d'éviter tout malentendu. Il serait également préférable de limiter l'accès aux données à des experts autorisés en épidémiologie spatiale, protection des données et science des données” détaille Wojciech Wiewiórowski, en rappelant “qu'une telle solution doit toujours être reconnue comme extraordinaire”.
Source : Le Monde