Coronavirus : la Chine se met à propager des fake news sur le COVID-19
A en croire les services de renseignements américains, la Chine mène en ce moment une campagne de désinformation sur les réseaux sociaux. Les autorités utiliseraient des techniques employées par les renseignements russes pour tenter de déstabiliser les sociétés américaines et européennes.
Qui souffle sur les braises de la mésinformation et pourquoi ? Les fake news ne datent pas de l'élection de Donal Trump président des Etats-Unis. Bien sûr, elles se sont développées énormément ces dernières années grâce aux réseaux sociaux. Mais les fausses nouvelles se sont toujours plus ou moins glissées dans les journaux au cours du XXe siècle. Sans parler des deux guerres mondiales où la propagande prenait le relais pour tenter de démoraliser la ou les parties adverses.
Fake News, mésinformation : une technique aussi vieille que le KGB
Du temps de l'Union Soviétique, le KGB avait usé de divers coups d'éclats pour déstabiliser les puissances étrangères, et ce, dès les années 1950. Jusqu'à créer une division dédiée, nommée “Service des mesures actives” de la 1ère direction générale du KGB. Au début il semble même que les dirigeants, notamment aux Etats-Unis, ne prennent même pas en compte la gravité de la menace.
Pourtant, le KGB s'affaire. L'avancement de ses agents aurait un temps été en partie conditionné à leur propension à trouver des idées pour déstabiliser les pays ennemis. Le but du service des mesures actives est simple : trouver un mensonge, un vecteur, comme un journal complaisant, pousser d'autres publications à reprendre l'info. Et bien sûr en cas d'accusation, tout nier en bloc.
Dans les années 1980, alors que l'on découvre le SIDA et ses ravages, le KGB lance alors une opération de mésinformation particulièrement insidieuse. Et qui fera date dans les manuels d'histoire. Une opération que l'on connait aujourd'hui comme l'Opération INFEKTION. Il s'agit de répandre la rumeur selon laquelle le virus aurait été développé dans un laboratoire contrôlé par l'armée américaine.
Opération INFEKTION
La rumeur est répandue une première fois dans un journal indien, qui cite un “scientifique bien connu” (mais nommé à aucun moment) pour donner de l'autorité à la rumeur. Le KGB va alors attiser l'histoire en poussant plusieurs autres publications à reprendre l'info et en stimulant la publication régulière de nouveaux éléments fabriqués.
Par exemple en reprenant les conclusions supposées de deux scientifiques est-allemands (donc du bloc soviétique) qui affirmaient avoir la “preuve” que les USA ont fabriqué le VIH (depuis la chute de l'URSS on sait bien sûr que tout cela est faux).
Les services américains ont entre temps fini par découvrir le pot-aux-roses et exiger de l'URSS la fin de l'opération. Mais le mal était déjà fait, à tel point que cette rumeur revient régulièrement¡errements jusqu'à ces dernières années – fait sans doute amplifié par le fait qu'il n'est pas toujours simple de remonter à la source de l'info, et à la persistance de théories du complot.
La crédibilité et la confiance envers les Etats-Unis auprès de nombreuses personnes s'en est trouvée longtemps écornée. Si plus d'informations sur le sujet vous intéresse, nous vous proposons de regarder ce documentaire de The New York Times sur l'Opération INFEKTION (qui s'appelait en réalité en interne opération Denver pour la petite histoire). Le document est en anglais mais des sous-titres sont disponibles :
Le successeur du KGB, le GRU, s'adonne toujours à la mésinformation
Or il semble que ce type d'opération a continué même après la chute du Mur de Berlin et l'effondrement de l'Union Soviétique. Le successeur du KGB, le GRU, utilise désormais davantage les outils électroniques, avec force d'armées de trolls, de faux comptes sur les réseaux sociaux et de médias contrôlés par le Kremlin très présents à l'international comme RT.
En France, comme aux Etats-Unis et dans le reste du monde, on a pu apprécier l'effet des fake news sur le climat ambiant et l'issue des élections. Or, comme si la Russie ne suffisait pas, il semble que la Chine a décidé de se mettre elle aussi à user des mêmes techniques, en plein coronavirus.
Il faut dire que Donald Trump semble l'avoir en quelque sorte un peu cherché. Depuis des semaines il se plait à critiquer publiquement la gestion chinoise de la crise du coronavirus, comme pour détourner le regard de sa propre gestion de crise – il s'était d'ailleurs lancé quelques mois plus tôt dans une guerre commerciale… et il ne surprendra donc personne que les relations entre les deux pays sont en ce moment particulièrement exécrables.
Le New York Times rapporte ainsi que, selon plusieurs agences de renseignement américaines, la Chine amplifie en ce moment la visibilité de fake news autour du coronavirus.
La Chine amplifie la mésinformation dans des campagnes qui visent les Etats-Unis et l'Europe
Précision importante : la source des fake news en question est trouble. Les autorités américaines ne sont pas parvenues à conclure qu'elles avaient été écrites par les renseignements chinois. Ils expliquent en revanche avoir la certitude que des agents chinois favorisent massivement leur propagation. L'une des plus virales de ces infox concerne le confinement aux Etats-Unis.
La rumeur en question prétend que, contrairement à ce qu'il dit, Donald Trump serait sur le point d'imposer un confinement obligatoire aux Etats-Unis. Une rumeur aux effets assez délétères dans un contexte déjà assez confus où Donald Trump pousse par exemple des américains à manifester contre le confinement… Et qui a donc poussé le conseil national de sécurité à confirmer dans un tweet qu'il s'agit bien d'une fake news.
Et apparemment les Etats-Unis ne seraient plus les seuls visés. Une campagne avec diverses rumeurs serait également, selon le New York Times, en train d'être menée en Europe. Comme on pouvait s'y attendre, la Chine a évidemment réagi à ces allégations pour tout nier en bloc : “Les déclarations en question n'ont aucun sens et ne valent même pas la peine d'être réfutées”, affirme le gouvernement chinois dans un communiqué.
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L'amplification de la mésinformation invite les internautes à la plus grande prudence sur les informations qu'ils lisent et reprennent. Il devient essentiel lorsque l'on tombe sur une info choc d'aller chercher la source, de croiser avec d'autres actualités sur le même sujet et de vérifier que l'info n'a pas déjà été repérée par un site de fact checking.