Digital detox : comment se déconnecter de son smartphone quand on est accro ?
“Accro à mon smartphone moi ? Pas du tout ! Je gère.” C'est cela oui ! Les études le démontrent, la majorité des utilisateurs de smartphones sont complètement accro. A tel point que même en vacances la déconnexion est impossible. Le phénomène est tel que le terme “digital detox” a vu le jour. On vous dit tout de cette nouvelle tendance visant à couper le cordon avec votre smartphone.
“Non mais lâche un peu ton téléphone Simone, on est ensemble là !”. Voilà une phrase que vous avez tous entendu. S'en suit souvent un long débat pour savoir qui dans un groupe est accro, qui ne l'est pas. Scoop : nous le sommes tous. Selon une étude de l'Observatoire des comportements de consommation publiée par Odaxa et Emakina, 86% des français ne parviennent pas à se déconnecter même pendant les vacances.
Le smartphone s'est tellement invité dans notre quotidien que nous en sommes devenus esclaves. Certains sont capables de le reconnaître, d'autres sont dans le déni. Mais les faits et les chiffres sont bien là. En 2018, les moeurs ont changé, certains comportements déviants se sont développés, nos rapports aux autres ont été bouleversés. Une nouvelle maladie a même été reconnue, directement liée aux smartphones : la nomophobie.
La technologie a évolué tellement vite que nous n'avons pas vu venir ses dérives. 2018 semble être l'année de la prise de conscience. Facebook par exemple développe un nouvel outil affichant le temps passé sur son application. Un début timide mais à souligner. Des applis permettant de gérer le temps passé sur son smartphone se multiplient. Et les téléphones vintage, permettant seulement d'appeler et envoyer des messages, font leur grand retour. Toutes ces méthodes de déconnexion ont donné naissance à une nouvelle tendance, la “digital detox”. Analyse.
Pourquoi sommes-nous accro à notre smartphone ?
Même si certains le nient farouchement, nous sommes tous accro à notre smartphone. A des degrés différents, mais nous le sommes tous. En dix ans à peine, cet objet technologique est devenu le prolongement de notre main, et indirectement de notre cerveau. Tantôt doudou numérique, tantôt source d'information infinie, il est également un véritable catalyseur de notre narcissisme.
Le smartphone, notre doudou numérique
A l'origine, la technologie était censée nous lier les uns aux autres. Dans les faits, la solitude est devenue la maladie de ce siècle. Le smartphone nous donne pourtant l'illusion du contraire. Entre messages et réseaux sociaux, il est devenu notre doudou numérique. Cet objet nous rassure face au stress du monde évoluant de plus en plus vite, trop vite. Jo Hemmings, psychologue du comportement à Global Security Mag :
Les gens sont obsédés par leurs smartphones, surtout les jeunes. Les téléphones sont devenus une manière de se réconforter, à l'image d'un bébé qui mâche une couverture. Il est devenu une part essentielle de la connectivité sociale.
La nomophobie, ou peur de râter quelque chose
Notre comportement frôle la schyzophrénie. Nous nous réconfortons avec un objet responsable de notre état. Car le smartphone est devenu une véritable source de stress, un relai constant vers ce monde qui bouge si vite. Les sonneries des notifications, les vibrations dans la poche, tous ces signaux déclenchent en chacun de nous un sursaut instantané. Les réactions divergent : certains peuvent attendre avant de dégainer leur machine, d'autres vérifient l'urgence de la situation. Les plus connectés ne peuvent s'empêcher de traiter chaque notification à l'instant même où elle se manifeste.
Cette dépendance a donné naissance à une nouvelle maladie, la nomophobie ou FoMo (Fear Of Missing Out), peur de râter quelque chose. Cette maladie entraine des comportements anxiogènes : sortir de chez soi sans son smartphone, rater une information, un message, une notification, provoquent un sentiment de stress et de solitude.
Les géants des médias sociaux ont développé des fonctionnalités pour nous pousser à rester connectés le plus longtemps possible, donnant l'illusion qu'il y a toujours quelque chose de nouveau à découvrir. C'est ce que l'on appelle le “scrolling”, cette technique de défilement nous faisant croire que nos fils d'actualités sont infinis. La lecture continue des vidéos sur Youtube par exemple repose sur le même principe. Le but est de garder l'utilisateur sur sa plateforme. Certains peuvent alors dérouler pendant de longues minutes, jusqu'à épuisement. Puis, toutes les vingt minutes en moyenne, le cycle redémarre.
Un booster d'ego
Facebook, Instagram, Twitter, Snapchat, Pinterest… les réseaux sociaux se sont multipliés à une vitesse folle durant ces dix dernières années. Rapidement, ils ont pris une place primordiale dans nos vies. Ils offrent la possibilité de donner son avis sur tout, aux yeux de tous, et augmentent ainsi les chances de se faire remarquer, d'exister. Quoi de mieux pour vaincre la solitude ?
Les géants du secteur l'ont bien compris et ont développé des systèmes de récompenses : likes et retweets rythment nos vies. Ces boosters d'égo sont devenus essentiels pour beaucoup. Outre le réconfort, les réseaux sociaux font naître chez certains des rêves de gloire.
L'arrivée de stars internationales comme Kim Kardashian, Paris Hilton et autres Emily Ratajkowki donnent des ailes aux jeunes utilisateurs. La starification du néant motive les plus fragiles (les plus paresseux aussi ?) à passer leur temps sur les réseaux sociaux. On voyage au bout du monde pour poster les plus belles photos, avec les plus belles poses, on joue les stars. Ce narcissisme exacerbé et ces méthodes d'évaluation nous ont conduit à des comportements individualistes, parfois déviants. Les faits divers contant le décès d'un malheureux voulant photographier un selfie au bord d'une falaise ou d'un enclos à crocodiles sont légion. L'échec peut faire naître frustration, tristesse ou déprime chez certains utilisateurs. Narcisse face à son reflet.
Des conséquences néfastes pour notre santé
Les études se multiplient. Sans débattre de l'impact des ondes sur d'éventuels cancers, le smartphone multiplie les risques de maladies chroniques, de rhumatismes, et de troubles psychologiques. Il a déjà totalement bouleversé nos rapports aux autres.
Du mal de dos aux problèmes de vues en passant par les troubles de l'attention et le stress
Il aura fallu attendre quelques années pour que les premières études soient publiées. Après 10 ans, nous avons le recul nécessaire pour mesurer les conséquences du smartphone sur notre santé. Chez les adultes, ce sont avant tout les yeux et les cervicales qui sont touchés. Les lumières bleues émises par les écrans de smartphones ont des conséquences néfastes sur notre vue et notre sommeil. Les constructeurs ont beau proposer des modes anti-lumières bleues, ils modifient les couleurs et sont donc souvent délaissés par les utilisateurs. Le phénomène est tel que les opticiens lancent des gammes complètes de lunettes filtrant les lumières bleues. Inimaginable il y a quelques années.
Plusieurs études ont également démontré que les traumatismes au niveau des cervicales se sont multipliés depuis l'arrivée des smartphones. Et c'est sans parler des troubles du sommeil déjà favorisés par la pression du travail et notre société dominée par la recherche de performances.
Chez les enfants aussi le smartphone est devenu un doudou. Mais les conséquences sont bien plus graves chez les plus jeunes : troubles de l'attention, stress, dépendance. Un contrôle des parents est absolument nécessaire. Des études ont déjà démontré que certains pré-adolescents développent des signes de dépression, avec des parfois des conséquences plus graves.
Bouleversement des rapports humains
Au restaurant, en famille, au travail, dans le couple… le smartphone a complètement bouleversé les rapports humains. Au départ le smartphone est censé permettre de communiquer avec ses proches depuis les quatre coins du monde. Hélas, il a aussi dégradé nos relations dans le réel. Combien de couples avez-vous déjà vu les yeux rivés sur leur smartphone au restaurant en plein dîner ? Combien de fois avez-vous entendu tonton Bernard dire à sa fille de ranger ce satané téléphone à table ? Combien de fois un ami vous a-t-il dit “attends je réponds à ce message et je t'écoute ensuite” ?
Ces comportements, tout à fait inappropriés, sont devenus presque normaux. Les règles de politesse et de vivre ensemble ont complètement changé. Le smartphone est devenu prioritaire. Le virtuel, ce qu'il se passe ailleurs, est plus important que ce qu'il se passe ici et maintenant. La peur de manquer quelque chose ? La vie virtuelle plus ennivrante que la vie réelle ? Plus de reconnaissance et d'attention en ligne qu'à la table familiale ? Probablement un peu tout cela à la fois. Toujours est-il que nos rapports ont perdu en spontanéité, en humanité. Un comble.
Digital Detox : les solutions pour lâcher son smartphone
Face à toutes ces dérives et à la multiplication des études, on assiste à une prise de conscience en 2018. Le mouvement est lent mais bien réel : les plus connectés souhaitent ralentir, souffler. Les géants du web s'y mettent petit à petit. La prochaine version d'Android indiquera le temps passé sur son smartphone. Facebook en fera autant. Mais l'utilisateur reste le seul maître à bord, les mesures prises par les géants étant seulement indicatives. Aucune excuse n'est valable, les méthodes pour décrocher étant nombreuses. La “digital detox” est à portée de main, encore faut-il vouloir se séparer un peu de son doudou.
La plus étrange : les applis anti-applis
La tendance “digital detox” a donné naissance à un phénomène étrange : les applis anti-applis. Offtime, Forest, Mytime… les applications detox poussent comme des champignons dans le Play Store et l'App Store. Leur but : vous aider à modérer votre utilisation du smartphone. Certaines donnent un décompte du temps passé, des applications les plus utilisées. D'autres vous empêchent complètement d'utiliser votre téléphone. Vous configurez un temps pendant lequel le smartphone ne pourra pas vous interrompre. Il sera impossible de l'utiliser avant la fin de ce temps. Même en l'éteignant et le rallumant. Forest, elle, surfe sur les vagues de la méditation, de l'émerveillement, de la patience et de l'ennui : cette appli propose de regarder un arbre virtuel pousser. Une pause apaisante bien méritée.
La plus radicale : ne plus utiliser de smartphone
Et si on rangeait son smartphone dans un tiroir ? C'est sans doute la méthode la plus radicale mais aussi la plus efficace pour se recentrer sur l'essentiel. Cette méthode chasse tout le stress lié aux notifications et sollicitations.
Pour que votre entourage ne s'inquiète pas, vous pouvez le prévenir avec un post sur les réseaux par exemple. Puis vous éteignez, et vous rangez la bête. Comme pour toute “addiction” il est recommandé de procéder par étapes. Essayez d'abord d'aller en courses sans votre smartphone, puis à une soirée, puis un week-end, quelques week-ends et des vacances complètes.
La plus modérée : la folie des téléphones vintage
En lançant une version moderne de son 3310 pour son grand retour, Nokia ne s'est pas trompé. Les téléphones vintage font un tabac. Du 3310 au Motorola Startac, les téléphones d'hier sont de nouveau tendance. Entre nostalgie, detox numérique et sécurité, ils réunissent tous les ingrédients du compagnon fiable mais pas envahissant.
Solides, endurants et petits, ces téléphones sont avant tout basiques : ils permettent de rester joignable, de téléphoner et d'envoyer des SMS. Pas de réseaux sociaux, pas d'internet, pas d'appareil photo. Sa présence rassure en cas d'accident, de panne ou d'urgence. Mais l'utilisateur reste le maître à bord. Une solution plus modérée pour une detox en douceur.
Conclusion
Que l'on soit modéré, compulsif ou complètement addict, nous sommes tous un peu accro à notre smartphone. Notre rapport au monde a changé, on s'exprime en 280 caractères, on s'offusque, on photographie ce qu'on mange, on partage nos vacances avec le monde entier, on se la joue même parfois mannequin sur Instagram. Nos sociétés sont devenues individualistes, on tente d'exister virtuellement, pour fuir une réalité qui nous déplait, nous déprime parfois, et le smartphone est le meilleur outil pour y parvenir.
Mais tous ensemble luttons contre ce fléau ! “Le smartphone c'est tabou, on en viendra tous à bout !”. On plaisante, évidemment. Mais face aux études alarmistes, aux faits divers effrayants, les utilisateurs semblent prendre conscience qu'il est temps de ralentir un peu. De se recentrer de temps en temps sur le réel, sur ses proches, sa famille, ses amis. Et vous, quelles sont vos méthodes pour vous déconnecter ?