Opinion : les smartphones n’innovent plus et doivent se reprendre
Que ce soit dans le fait de proposer des processeurs toujours plus puissants ou des nouveautés gadget comme le Force Touch, on constate que les nouveaux smartphones ont de plus en plus de mal à être vraiment innovants. Mais pourquoi ?
Le marché des smartphones évolue sur ces dernières années principalement grâce à la percée des constructeurs chinois qui réussissent, grâce à des prix agressifs et une sortie mondiale de leurs téléphones, à grignoter des parts de marché aux gros poissons que sont Apple et Samsung.
Mais si ce n’est l’argument du prix, rien ne change vraiment pour nos smartphones. L’arrivée des écrans QHD (ou un 4K timide dans le cas de Sony et son Xperia Z5 Premium), l’adoption des scanners d’empreinte digitale ou la progression toujours plus phénoménale de la qualité photo de nos appareils n’empêchent pas une vérité simple pour nos smartphones : l’utilisation reste toujours la même.
Car quand bien même l’on renouvelle le hardware année après année, nous ne faisons que reprendre les mêmes habitudes de consommation : un peu de réseaux sociaux, un peu de jeu, un peu de vidéo et au lit.
L’évolution perçue de notre matériel n’est pas tant dû à nos usages qu’à notre propre envie de voir du neuf. En vérité, les 10% de rapidité acquis ou la poignée de pixels supplémentaire de l’appareil photo n’ont pas grand impact sur notre utilisation.
Un univers d'applications limité
Cela est dû au frère jumeau du matériel qui est peu considéré et pourtant central : les applications. En effet, les logiciels auxquels nous avons accès via le Play Store de Google ou l’App Store d’Apple n’ont pas véritablement évolué. Les usages proviennent bien plus pourtant de ces magasins que de nos téléphones, qui fournissent les outils en nous laissant imaginer leurs utilités.
Leur structure, dans un premier temps bordélique, a au fil des ans su trouver les moyens de faire ressortir les nouvelles expériences intéressantes : mise en avant, sélection plus détaillée, et système de notation ont permis à l’utilisateur moyen d’être mis au contact des expériences les plus intéressantes de nos smartphones.
Ce qu’il manque véritablement, c'est l’innovation logicielle. La majorité des applications smartphones de nos jours est transformative : en prenant exemple de son voisin et en améliorant ses concepts, à l’image d’un Snapchat, on se garantit de trouver le succès sans chercher à renouveler la formule.
Et c’est là tout le nerf du problème : l’utilisation quotidienne de nos smartphones n'est plus qu'un dérivé plus puissant ou beau de ce que nous faisions avant. Nous ne faisons qu’attendre le prochain Clash of Clans ou le futur Twitter, pour remplacer ce que nous connaissions déjà.
Les évolutions matérielles récentes ne font que polir une expérience déjà bien ancrée : la sécurité s’améliore avec le capteur d’empreinte, la pratique est plus souple avec le Quick Charge, mais rien ne vient véritablement changer notre conception de l’utilisation de notre appareil.
Bridé par le manque d’adaptabilité
Pourtant, quelques révolutions logicielles méritent d’être prise en compte. Le Google Wallet (devenu Android Pay) et son homologue Apple Pay font partie de ces nouveaux usages qui ont la capacité de transformer notre quotidien.
La sécurité renforcée de nos téléphones, leur évolution technologique et la baisse de leur prix font que nous pouvons très bien envisager de remplacer la carte de crédit par le paiement sans contact via smartphone.
Ces usages pourraient tout à fait changer notre quotidien. Mais là encore s’oppose une autre notion : l’administratif. Rien ne gêne l’expansion massive de ces moyens de paiement plus que les banques n’aimant pas cette nouvelle concurrence ou l’Etat ne sachant pas réagir rapidement pour permettre une telle révolution technologique.
Pourtant, sur ce même ordre d’idée, ces applications pourraient faciliter une gestion administrative chaotique. En imaginant des applications du quotidien permettant par exemple la sauvegarde et la synchronisation de ses informations de sécurité sociale, qui seraient, via la numérisation, plus facilement archivables et traitables à une échelle massive. Cela occasionnerait un gain de temps colossal pour de nombreuses institutions.
Le matériel lui-même ne vient pas bouleverser un équilibre connu de tous. Les fiches techniques, et souvent même le design, des smartphones se ressemblent tant que l'acheteur n’a finalement pour illusion de choix que ce que la publicité des constructeurs lui donne.
Où sont les fonctionnalités vraiment innovantes ? L’implémentation d’un écran e-ink au dos du Yotaphone 2 n’aura certes pas permis au téléphone d’avoir un impact sur le marché, mais l’on reconnaîtra au moins une proposition différente de ses concurrents.
Et bien sûr, le manque d’évolution d’un des matériels les plus importants de nos smartphones ralentit énormément cette évolution : la batterie. Avec une autonomie d’une journée, il est difficile de vraiment voir un smartphone capable d’être un pilier de notre quotidien.
La recherche et le développement extrêmement coûteux de ce domaine ne convainquent pas les principaux constructeurs qui n’en ont pas besoin pour enregistrer des bénéfices en hausse.
Un coup de pied dans la fourmilière
Aussi les smartphones ont grand besoin d’un coup de pied dans la fourmilière pour avancer. L’innovation devrait être le maître mot d’une industrie qui s’endort sur ses lauriers sans véritablement prendre les devants de sa technologie. Elle est pourtant loin d’être achevée, alors que ses usages pourraient devenir bien plus importants.
Une première évolution est toutefois enregistrée : avec le Continuum de Microsoft, les smartphones deviennent de plus en plus indépendants de nos ordinateurs centraux et de véritables outils de productivité aux quotidiens.
La supposée fusion de Chrome OS et Android, ou les roms prenant les devants en ce sens comme Remix OS, pourrait être le prochain chemin de révolution des usages. Qu’est-ce que le Google Pixel C si ce n’est une preuve que Google regarde vers l’avenir sans y être encore prêt ?
Reste que le terreau n’est pas fertile lorsque les développeurs n’investissent pas dans des idées novatrices et se contentent de suivre des effets de mode par milliers. Plus que de suivre la tendance, le développement d’application végète en étant en mal de création de tendance nouvelle.
Mais celui-ci restera toujours plus souple que nos administrations, qui à l’image d’un Windows est si enfermé dans son respect d’une organisation vieillissante qu’elle fait du mal à la création.
Les smartphones n’ont en tout cas pas fini leur révolution et réserve un potentiel inexploité qu’il est frustrant de voir rester latent.