Facebook, Twitter, Instagram : la loi Avia leur impose de supprimer tout contenu haineux dans les 24h
Facebook, Twitter, Instagram et les autres réseaux sociaux vont devoir se mettre à la page. Le 13 mai, la loi Avia, qui vise à lutter contre la haine sur Internet, a été adoptée. Une loi polémique qui inquiète les associations défendant la liberté d'expression. Voici ce qu’elle va changer.
La loi dite « Avia » contre la haine sur Internet a été adoptée le 13 mai en dernière lecture à l’Assemblée nationale. Prévue pour entrer en vigueur le 1er juillet 2020, elle cherche à lutter contre les messages de haine ou menaces sur les réseaux sociaux. En plus de susciter l’inquiétude de certaines associations qui défendent la neutralité du net, la rapporteuse de la loi, Laetitia Avia (La République en Marche), est au centre d’une polémique suite à un article de Mediapart.
Quel est l'objectif de la loi Avia ?
La loi Avia veut lutter contre toute forme de haine sur Internet, et surtout sur les réseaux sociaux. Dans les faits, cela signifie qu’après signalement, les plates-formes seront dans l’obligation de retirer les contenus haineux, racistes ou homophobes dans les vingt-quatre heures. En cas de manquement, les entreprises pourraient être condamnées à des amendes très lourdes, allant jusqu’à 1,25 million d’euros. Les contenus à caractère pédopornographiques et terroristes sont également concernés, mais le délai est cette fois réduit à une heure.
Un bouton dédié au signalement de ce genre de contenus sera rendu obligatoire pour les réseaux (il existe déjà sur Twitter par exemple) et tout abus sera puni. Ainsi, ceux qui dénoncent abusivement un utilisateur innocent encourent jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. Le tout sera chapeauté par le CSA.
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Pourquoi l’opposition dénonce-t-elle une loi liberticide ?
La promulgation inquiète non seulement l’opposition, mais également les associations de défense de la liberté d’expression. Par exemple, qu’est-ce qu’un contenu haineux ? Si certains messages ne laissent que peu de doutes, d’autres sont sujets à interprétation. Par exemple, un message qui s'attaque à la religion peut-il être considéré comme un appel à la haine dans cette loi ? Un flou qui inquiète la quadrature du net, qui voit déjà là l’impossibilité de l’appliquer de manière cohérente.
L’autre aspect qui inquiète, c’est la proposition qui oblige les réseaux à fermer tout contenu à caractère terroriste en moins d’une heure après signalement de la police. L’interprétation des messages est encore au centre des inquiétudes, tout comme le fait que ce soit la police, sans passer par un juge, qui décide de ce qui doit être censuré ou non. En cas de non-respect, les sites concernés pourraient être rendus inaccessibles via les hébergeurs.
Le risque serait de voir les réseaux sociaux se montrer très prudents avec les messages postés par les utilisateurs. On pourrait alors craindre une autocensure de grande ampleur, ce qui fait peser la menace d’une liberté d’expression encadrée par des entreprises privées (et étrangères pour la plupart).
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Pourquoi Laetitia Avia est-elle au coeur d'une polémique ?
La loi fait également polémique sur sa forme. L’opposition dénonce par exemple un texte voté dans la précipitation, alors que la crise du coronavirus est encore loin d’être terminée. De plus, l’hémicycle est encore bien vide, beaucoup de députés ayant l’impossibilité de se rendre à Paris, et donc d'exprimer leur opinion sur le sujet. La dernière polémique concerne la rapporteuse de la loi, Laetitia Avia. Le 12 mai, un jour avant le vote à l’assemblée, le journaliste David Perrotin publie dans Mediapart une enquête se basant sur les témoignages d’anciens collaborateurs de la députée.
Ces derniers l’accusent de propos homophobes, racistes et sexistes, captures d’écran Whattsapp et enregistrements audio à l’appui. À cela s'ajoutent des accusations de harcèlement moral. Laetitia Avia a nié en bloc et a annoncé porter plainte contre le journal en ligne pour diffamation. Quoi qu’il en soit, la loi est désormais votée. L’histoire n’est cependant pas terminée, puisque le sénateur LR Bruno Retailleau a annoncé saisir le Conseil constitutionnel.
Source : AFP