Google : espionnage illégal, licenciements abusifs… la firme tente de tuer ses syndicats par la terreur

Une plainte du National Labor Relations Board, agence publique des travailleurs accuse Google de violer les lois sur le travail en espionnant des salariés qui organisaient une grève, avant de licencier deux d'entre eux. La firme fait désormais appel aux services de IRI Consultants, connu pour ses méthodes anti-syndicats.

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Il y a encore quelques années de cela, Google était considéré comme l'une des meilleures entreprises dans le monde où travailler. Et pour cause : en plus de salaires élevés, ces derniers profitaient d'un campus sur-équipé, avec non seulement des restaurants, mais aussi diverses activités et projets entre salariés. Le tout sur fonds de culture historiquement centrée sur l'ouverture et la transparence.

Google n'avait-il pas d'ailleurs repris à son compte ce slogan désormais abandonné : “don't be evil” (ne sois pas diabolique) ? Or, depuis, l'entreprise semble avoir entamé une profonde mutation interne. Malgré la taille de Google, les activités syndicales, pourtant protégées par la Loi (y compris aux Etats-Unis), y sont désormais particulièrement mal vues.

Google ne veut surtout pas entendre parler de syndicats

Au point que la firme n'hésite plus à espionner illégalement les salariés qu'elle soupçonne de penchants militants, avant de prononcer dans certains cas des licenciements. C'est ainsi qu'une plainte du National Labor Relation Boards, une agence américaine chargée des relations entre les salariés et les entreprises américaines (le NLRB organise notamment, entre autres, les élections syndicales dans les entreprises où c'est obligatoire) accuse Google d'avoir illégalement licencié deux salariés en 2019 en connexion avec leur activités syndicales.

A l'époque Laurence Berland et Kathryn Spiers s'opposaient à la décision de Google de travailler avec IRI Consultants, une firme connue pour ses méthodes anti-syndicales. IRI Consultants travaille normalement avec les hôpitaux et les organismes de soin. Sur son site internet on peut voir dans la panoplie de ses services “l'évaluation des vulnérabilités liées aux syndicats” tout en soulignant ses succès en la matière.

On y apprend par exemple que IRI a réussi à “persuader les employés d'une grande entreprise de santé nationale d'éviter les élections syndicales malgré le fait que ces mêmes syndicats ‘dépensent des millions de dollars dans des campagnes de mobilisation'”. Tout un programme. Laurence Berland a été débarqué alors qu'il passait en revue le calendrier (public en interne) d'autres collègues.

Le syndicalisme est pourtant protégé aux Etats-Unis… y compris chez Google

Kathryn Spiers a quant à elle été virée après avoir créé une popup qui ne s'affichait que lorsqu'un employé de Google visitait le site de IRI Consultants. Avec ce message : “les Googlers ont le droit de participer à des activités concertées protégées”. D'autres employés ont été licenciés à cause de leur opposition à IRI Consultants, mais selon le NLRB seul ces deux cas sont réellement contentieux.

Laurence Berland explique : “le fait que Google embauche IRI est sans ambiguïté une manière de dire que le management ne tolèrera plus l'organisation des travailleurs. Le management et leurs acolytes tueurs de syndicats voulaient envoyer ce message, et le NLRB envoie désormais sa réponse : l'organisation des travailleurs est protégée par la loi”.

Kathryn Spiers déclare de son côté : “cette semaine, le NLRB a porté plainte en mon nom. Ils se sont rendu compte que j'ai été illégalement licenciée pour avoir tenté d'aider mes collègues. Des collèges et autres croient que j'ai abusé mon rôle à cause de mensonges en provenance du management de Google alors qu'ils étaient en train de lancer des représailles à mon encontre. Le NLRB peut forcer Google à me rétablir, mais cela n'annulera pas les dommages déjà infligés à ma crédibilité“.

Google campe sur sa position, mais risque de devoir faire marche arrière

A partir de maintenant deux scénarios sont possibles. Le plus probable c'est que la résolution du conflit se passe essentiellement entre avocats, comme c'est souvent le cas aux Etats-Unis. Dans le cas contraire, l'affaire ira devant le juge dans les prochains mois. Google risque alors effectivement de devoir rétablir les employés abusivement licenciés et de verser les salaires non perçus.

Google campe néanmoins sur sa position dans un communiqué transmis à nos confrères de The Verge : “Nous sommes fier de notre culture et nous nous engageons à la défendre contre les tentatives délibérées d'individus de la saper – y compris en violant des politiques de sécurité et des systèmes internes”.

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Et Google de poursuivre : “Nous continuerons à fournir des informations au NLRB et au juge administratif sur notre décision de licencier ou discipliner les employés qui ont abusé de leurs accès privilégiés à nos systèmes internes, tels que nos outils de sécurité et calendriers de collègues. De telles actions sont une violation sérieuse de nos politiques et une rupture inacceptable de notre confiance dans la responsabilité, et nous défendrons notre position”.

Source : The Verge

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