Huawei : Taiwan interdit trois smartphones qui placent l’île dans le territoire de Chine
Taïwan a suspendu la vente de trois smartphones Huawei. Le problème, c'est que plusieurs applications natives placent l'île sur le territoire chinois. Taiwan, aussi appelé République de Chine (ROC) est pourtant un territoire gouverné indépendamment de la République Populaire de Chine (RPC) depuis 70 ans.
Taiwan a décidé de retirer de la vente trois smartphones Huawei sur fond de tensions géopolitiques entre l'île – aussi appelée République de Chine – et la République Populaire de Chine (autrement dit la Chine de Xi Jingping).
Si vous êtes un peu rouillés question histoire contemporaine de l'Asie de l'Est, voici un récapitulatif rapide : en 1946, le Japon dépose les armes et se retire de la Chine continentale et la guerre civile reprend entre les communistes (Parti Communiste Chinois) et les conservateurs du Kuomintang (KMT) au pouvoir.
Entre la Chine continentale et Taïwan, une histoire tumultueuse
Guerre civile qui se solde par l'établissement de la République Populaire de Chine sur le continent, et la fuite de l'ancienne administration sur l'île de Formose – devenue Taïwan. Jusqu'à ce jour, techniquement, la République Populaire de Chine revendique l'île de Taïwan comme étant partie de son territoire.
Et inversement Taïwan – la République de Chine – se pose comme le seul représentant de la Chine dans son ensemble. Même si dans les faits sa juridiction ne couvre que Taïwan et une poignée d'îles. Et que cette position s'est considérablement infléchie dans dans les 50 dernières années avec la perte de son siège au conseil de sécurité de l'ONU (ils sont depuis les années 70 remplacés par la République Populaire de Chine) et la démocratisation du territoire.
Les deux territoires ont pris des routes différentes avec d'un côté un régime communiste très autoritaire, et de l'autre une démocratie pluraliste qui vient par exemple de légaliser le mariage gay. Or la situation entre les deux ensembles reste très tendue : des missiles Chinois sont par exemple en permanence pointés vers Taïwan.
Et les forces politiques locales sont divisées entre ceux qui voudraient faire de Taïwan un pays indépendant et ceux qui plaident davantage pour une réunification avec la Chine continentale – sous réserve de pouvoir conserver des valeurs démocratiques. Or, ni l'une ni l'autre de ces solutions n'est idéale : la première expose potentiellement Taïwan à une invasion de l'armée chinoise.
Le mot de trop
Tandis que dans le second cas, rien ne garantit que Taïwan pourra continuer à jouir d'un système politique aussi pluraliste et d'autant de libertés individuelles. Du coup, le statut quo perdure. Et dans ce contexte on comprend comment une petite mention déplacée dans un smartphone made in RPC et vendu en ROC se transforme en un véritable événement.
Ainsi trois smartphones Huawei, les P30, P30 Pro et Nova 5T ont été interdits de la vente à Taïwan après la découverte de plusieurs mentions dans leur système d'exploitation qui placent Taïwan en République Populaire de Chine – une mention d'autant plus troublante que les liens entre Huawei et le gouvernement communiste de la Chine continentale sont régulièrement évoqués.
La commission taïwanaise de communication (NCC) explique “les libellés dans ces smartphones ne reflètent pas des faits et a également heurté la dignité de notre pays”. Avant d'ajouter n'avoir pas eu d'autre choix que de “prendre des mesures strictes pour sauvegarder la dignité nationale”. Et de menacer de transformer cette suspension en interdiction permanente si Huawei ne faisait pas les changements nécessaires dans son système d'exploitation.
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Le distributeur local de ces smartphones Xunwei Technologies affirme être en lien avec Huawei pour tenter de résoudre le problème. Ironie de l'histoire, Huawei s'est déjà retrouvé dans une situation semblable pour le problème inverse : ses smartphones ne plaçaient pas Taiwan en Chine dans les versions destinées à la RPC.
Source : CNA