Les IA génératives entrainées avec des contenus sous copyright sont-elles légales ?
Une association porte plainte contre les concepteurs de deux IA génératives spécialisées dans la création musicale. Elle les accuse d’avoir entrainé leurs modèles avec des chansons protégées par le droit d’auteur, estimant que chaque morceau créé par leurs IA est susceptible d’utiliser des bouts des chansons originales. Un cas légal qui pose la question de la « parentalité » d’une chanson créée par une intelligence artificielle.
On peut tout créer avec une intelligence artificielle aujourd’hui. Des articles, en imitant le style d’un journaliste. Tout ou partie d’images et de photos, voire même des peintures en singeant le style d’un artiste. Des vidéos. Et même de la musique. Certains morceaux récents ont été produits à l’aide de l’intelligence artificielle, comme “Now and then“, le dernier single des Beatles, composé en 1978 par John Lennon et disponible en streaming en novembre 2023.
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Dans ce cas, l’IA a principalement servi à isoler la voix de John Lennon. Mais pour d’autres chansons, le modèle a participé à la création du morceau. C’est le cas de “Heart on my Sleeve”, une chanson créée avec une IA par un utilisateur de TikTok, en imitant la voix d’artistes réels (ici Drake et The Weeknd). Au-delà de l’aspect légal de ce « deepfake » intégrant deux artistes, une autre question se pose à propos des contenus créés avec une IA : les artistes qui ont participé à l’entrainement du modèle génératif doivent-ils être rémunérés ?
Peut-on entrainer une IA générative avec du contenu protégé ?
La RIAA, association américaine représentant les principales maisons de disques, a porté plainte contre les créateurs de deux IA génératives dédiées à la musique, Udio et Suno, ce dernier ayant récemment été intégré à Copilot. Ces deux IA ont été, au moins partiellement, entrainées à créer des morceaux grâce à un répertoire soumis au droit d’auteur. Elles vont ensuite créer des morceaux qui ont parfois des similitudes avec les chansons utilisées lors de leur entraînement. Il y a donc comme un « héritage numérique ».
L’association estime qu’il existe donc un lien de parentalité entre les chansons des artistes protégés par le droit d’auteur et les morceaux créés par les modèles génératifs. Il y a donc un manque à gagner pour les auteurs des chansons d’origine. Et les sommes sont astronomiques. Cependant, ce n’est pas l’angle financier le plus important ici. En effet, au-delà de l’aspect purement financier qui motive la plainte, il y a des questions légales sur la propriété intellectuelle de tous les contenus générés par une IA qui a utilisé des œuvres pour s’entrainer.
Parce que sans ces œuvres, l’IA serait incapable de produire un contenu qualitatif. Car, il faut que le contenu soit qualitatif pour attirer des utilisateurs (et potentiellement des clients). Or, si les propriétaires de chaque modèle devaient payer une redevance aux ayants droit pour chaque contenu créé avec leur IA, le nombre de modèles disponibles chuterait. Et pas uniquement dans la musique, mais dans la production écrite et la vidéo également. Cette affaire rappelle évidemment la plainte déposée par le New York Times contre OpenAI et Microsoft pour des raisons similaires. Reste à savoir de quel côté la justice penchera.