Impôts : le Fisc veut espionner les contribuables sur les réseaux sociaux
Les services des impôts pourraient bientôt espionner vos faits et gestes sur les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter ainsi que sur les plateformes telles que Le Bon Coin. La mesure est introduite à l'article 57 du nouveau projet de Loi des finances – elle s'appuierait sur une surveillance de masse, automatisée par des algorithmes. La CNIL s'inquiète de ce tournant.
Le gouvernement a introduit au projet de loi des finances 2020 une mesure controversée. L'article 57 du PLF 2020 prévoit en effet “à titre expérimental et pour une durée de trois ans” de “collecter et exploiter au moyen de traitements informatisés et automatisés n'utilisant aucun système de reconnaissance faciale les contenus, librement accessibles, publiés sur internet par les utilisateurs des opérateurs de plate-forme en ligne”. L'objectif de cette mesure est de “rechercher les infractions” – outre les impôts, l'administration des douanes et des droits indirects peut également utiliser les mêmes méthodes.
Le ministère des Finances et les douanes pourraient bientôt espionner tout le monde sur les réseaux sociaux
Le texte précise que des agents doivent “être spécialement habilités” pour réaliser cette collecte massive. Dans l'exposé des motifs, on peut lire que “l‘administration fiscale développe, depuis 2013, un traitement automatisé de données dénommé ‘ciblage de la fraude et valorisation des requêtes' (CFVR) consistant à appliquer des méthodes statistiques innovantes sur des informations en provenance de l'administration fiscale et d'autres administrations, de bases de données économiques payantes et de données en libre accès”. Des expérimentations dont les résultats ont été jugés “encourageants”.
Après s'être penché sur le texte la CNIL émet de sérieuses réserves à ce changement de paradigme. Le texte pose selon la commission des “questions inédites en matière de données personnelles”. Ce qui dérange surtout la CNIL c'est la dimension massive de cette collecte. Des agents assermentés pourront en effet demander à des algorithme de scanner Facebook, Twitter, Le Bon Coin, Ebay et d'autres plateformes pour repérer les comportements suspects. Le texte promet une “collecte générale préalable des données” en lieu et place de concentrer les efforts sur une poignée de cas suspects.
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Selon la CNIL, le texte pourrait modifier “de manière significative le comportement des internautes qui pourraient alors ne plus être en mesure de s’exprimer librement sur les réseaux et plates-formes visés”. Il n'est par ailleurs pas proportionné, selon l'institution qui pointe le fort déséquilibre entre l'objectif visé et l'intrusivité de la mesure – et il manque selon la CNIL de “garanties”. Il y a pourtant déjà quelques limites prévues par le texte. Les données sont ainsi supprimées sous 30 jours lorsqu'elles ne sont pas utilisées. Il doit également faire l'objet d'une évaluation sur le respect des données personnelles à l'issue de l'expérimentation. Un examen qui pourrait, ou non, conduire à la reconduction du dispositif.
Source : Netpublic