La justice peut exiger le code de déverrouillage de votre smartphone

L'assemblée plénière de la Cour de cassation du 7 novembre 2022 vient de répondre à une question cruciale : peut-on refuser de donner aux autorités le code d'accès de son smartphone dans le cadre d'une enquête ? Pour la juridiction suprême, cela peut représenter un délit.

code pin cour cassation

Peut-on refuser de donner le code de déverrouillage de son smartphone dans le cadre d'une enquête judiciaire ? Figurez-vous que vous serez coupable d'un délit, en vertu de l'article 434-15-2 du code pénal. C'est en tout cas la position de la Cour de cassation dans son arrêt rendu ce 7 novembre 2022. 

Pour appuyer sa décision, l'assemblée plénière de la Cour de cassation s'appuie donc sur cet article qui prévoit que “refuser de donner aux autorités judiciaires la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie est susceptible d'avoir été utilisée pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit est puni de 3 ans d'emprisonnement et de 270 000 € d'amende”. 

Une question judiciaire qui remonte à 2019

Avant de rentrer dans le détail, replaçons le contexte. En 2019, une personne a été arrêtée pour possession de produits stupéfiants. Pendant sa garde à vue, elle a refusé de remettre aux enquêteurs les codes permettant  d'accéder à deux smartphones susceptibles d'avoir été utilisés dans un trafic de drogues. 

Le prévenu, poursuivi par une juridiction correctionnelle, n'a pas été condamné pour avoir refusé de donner les précieux sésames. A l'époque, la cour d'appel avait considéré que ces codes ne représentaient pas “une convention de déchiffrement d'un moyen de cryptologie” car il ne servait pas à décrypter des données, mais uniquement à débloquer un écran d'accueil permettant d'accéder à des données contenues dans l'appareil. 

En 2020, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté cette décision, assurant qu'au contraire, le code de déverrouillage d'un smartphone pouvait être considéré comme une clé de chiffrement. Seulement en 2021, la cour d'appel de Douai a choisi d'ignorer cette jurisprudence et a relaxé à nouveau l'accusé. Le parquet général décide alors de pourvoir une nouvelle fois en cassation. 

Un code reste une clé de chiffrement pour la Cour de cassation

Et nous voilà donc au 14 octobre 2022, date à laquelle la Cour de cassation a choisi de réexaminer cette affaire en assemblée plénière, soit la formation la plus importante puisque toutes les chambres de la Cour y sont représentées. La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire estime à nouveau que “le code de déverrouillage de l'écran d'accueil” d'un smartphone “peut constituer une clé de chiffrement”. Par extension, “son détenteur, qui aura été informé des conséquences pénales d'un refus, est tenu de donner aux enquêteurs le code de déverrouillage de l'écran d'accueil”. Vous l'aurez compris, la Cour de cassation a donc censuré une nouvelle fois l'arrêt de la cour d'appel de Douai, et il revient désormais à la cour d'appel de Paris de rejuger cette affaire.


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