La pénurie de composants touche aussi les machines de fabrication de puces
La pénurie de composants touche tous les secteurs liés à l’électronique. Pour la contrecarrer, il faut augmenter les chaînes de production. Pour cela, il faut que les fabricants s’équipent de machines spécifiques. Or, le principal fournisseur de ces machines est lui aussi victime d’une pénurie. Il explique qu’il sera dans l’incapacité de répondre à la demande avant 2024.
Nous évoquons régulièrement la pénurie de composants. Et pour cause : elle touche de nombreux secteurs d’activité que nous couvrons dans nos colonnes. Qu’il s’agisse des smartphones, des cartes graphiques, des consoles de jeu vidéo, des voitures électriques, des tablettes ou encore des ordinateurs. Cette pénurie a été flagrante dès l’arrivée de la PlayStation 5 et de la Xbox Series X et elle dure maintenant depuis plus d’un an et demi. Trois raisons principales expliquent cette pénurie.
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D’abord, la crise sanitaire mondiale qui a paralysé les usines et les chaînes logistiques. Même si la situation s’améliore, le transport des marchandises reste aujourd’hui très compliqué. Ensuite, les foyers ont investi fortement pour équiper leur domicile, afin de travailler à distance et se divertir chez soi. Télévision. Console. Ordinateur. Etc. Enfin, de nouvelles industries ont massivement acheté des composants électroniques. C’est notamment le cas du secteur automobile où tous les constructeurs étoffent leur catalogue de voitures électriques pour se préparer à la fin des moteurs thermiques. Et elles embarquent de nombreux composants.
Le principal fournisseur d'équipement lithographique est en rupture de stock
La demande est donc forte, que ce soit au niveau des marques ou des consommateurs. Les fabricants de puces ont été pris au dépourvu et n’ont pas eu le temps d’anticiper. Aujourd’hui, tous les fabricants annoncent une forte augmentation de leurs capacités de production. Samsung a annoncé vouloir créer une usine de production de puces aux États-Unis. Foxconn a également fait une annonce similaire. De même pour Intel. Mais quand seront-elles opérationnelles ? Selon un article du Financial Times, ce n’est pas pour tout de suite.
Le quotidien américain a en effet publié une interview de Peter Wennink. Il est le patron d’une entreprise appelée ASML. Vous ne la connaissez certainement pas. Il s’agit pourtant d’une société très importante : elle est le leader mondial des équipements lithographiques pour la fabrication des puces électroniques. Grâce à ces machines, les usines gravent les circuits électroniques sur les disques de silicium. Tout simplement. Dans cette interview, Peter Wennink avoue qu’il est dans l’impossibilité de répondre à la demande des usines qui souhaitent ouvrir de nouvelles lignes de production.
Il explique que la demande est si forte qu’il sera en rupture de machine au moins « l’année prochaine et l’année suivante ». Soit jusqu’en 2024. Il va pourtant livrer plus de machines en 2022 qu’en 2021. Et il en livrera plus en 2023 qu’en 2022. Mais, pour répondre à la demande, il faudrait qu’il augmente son rythme de production de plus de 50 %. « Pour arriver à cela, cela prend du temps ». Du temps, il en faut pour ASML, mais aussi à ses fournisseurs. Car eux aussi doivent répondre à la demande.
Les équipements pour créer des composants sont victimes d'une pénurie de composants !
L’article évoque le cas de Carl Zeiss. L’opticien allemand fabrique les lentilles de verre qui sont utilisées dans les machines lithographiques. Elles servent à transporter la lumière qui va imprimer les circuits électroniques sur le substrat de silicium. Carl Zeiss ne peut fournir aujourd’hui suffisamment de lentilles pour les besoins d’ASML et de ses concurrents. L’entreprise souhaite donc augmenter le nombre de lignes de production. Mais elle doit d’abord obtenir certaines autorisations, notamment pour les salles blanches. Puis elle doit construire ces salles, les équiper et engager du personnel pour manipuler les machines. Et dès cet instant, elle peut commencer le processus de fabrication des lentilles. Il faut alors attendre encore un an avant que les nouvelles lentilles sortent des usines et soient livrées.
Le témoignage d’ASML est très intéressant. Il démontre simplement que la résolution de la pénurie de puces n’est pas près d’être résolue, même si les principaux fabricants de composants investissent beaucoup d’argent dans des usines. Car, même si ces dernières sortent de terre dans les prochains mois, elles resteront certainement vides.