Loi “Fake News”: tout comprendre en 5 questions

Déposée fin Mars 2018 par le groupe LREM, la loi dite “Fake News” fait des émules. Tantôt adoubée, tantôt décriée, elle a pour but de lutter contre les fausses informations diffusées sur internet. Le gouvernement souhaite légiférer afin d'éviter les polémiques comparables à celles qui ont suivi l'élection présidentielle américaine. Mais qu'est-ce que cette loi “Fake News” ? Que va-t-elle changer ? Qui sera juge ? Voici comment comprendre cette loi en 5 questions.

C'est LE sujet d'actualité du moment. La loi “Fake News” fait couler beaucoup d'encre. Et pour cause, elle vise à encadrer les informations diffusées sur internet et les réseaux sociaux. Suite à l'élection américaine, Facebook et d'autres acteurs du web ont été pointés du doigt, accusés d'avoir favorisé l'élection de Donald Trump. A l'étranger, certains sites diffusent également des informations erronées, non vérifiées, qui font gonfler la bulle complotiste sur le web.

C'est dans ce contexte que le groupe parlementaire LREM a proposé une loi de luttre contre les fausses informations. Depuis la proposition, le texte a été modifié à plusieurs reprises. Après un passage en commission des lois et des affaires culturelles ces dernières semaines, les députés vont devoir voter. Pour certains, les enjeux de ce texte sont encore flous. Petit éclaircissement en 5 questions.

Les “Fakes News” qu'est-ce que c'est ?

La loi ne mentionne pas l'expression “Fake News”. Il faut parler de “proposition de loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information”. La législation encadrait déjà en partie la diffusion de fausses informations, mais le texte originel ne définissait pas ce qui caractérise une fausse info. En commission, les députés ont donc ajouté cette définition. Une “Fake News” est “toute allégation ou imputation d'un fait dépourvu d'éléments vérifiables de nature à la rendre (l'info) vraisemblable”. Ils précisent que l'intention a son importance.

Ainsi, pour être caractérisée de “Fake News”, une information doit être publiée “de mauvaise foi” et “diffusée de manière artificielle ou automatisée et massive par le biais d'un service de communication au public en ligne”. Pour faire simple, seules les informations diffusées sur le web et les réseaux sociaux sont concernées. Petite particularité : les chaînes TV étrangères sont aussi dans le viseur. Le législateur exclut les textes humoristiques et satiriques.

Et les réseaux sociaux ?

Les réseaux sociaux ont joué un grand rôle dans la diffusion de “Fake News” durant les élections présidentielles américaines et françaises. Ils sont donc aussi concernés par cette loi. La loi impose donc aux géants du secteur de fournir “une information loyale, claire et transparente” sur les contenus sponsorisés (contenus pour lesquels n'importe quel utilisateur peut payer pour les mettre en avant).

Dorénavant, les réseaux sociaux devront indiquer très clairement “l'identité, l'objet social et le siège social” de la personne ou de l'entité à l'origine du contenu sponsorisé. En parallèle, ils devront rendre publiques toutes les actions menées par leurs soins pour lutter contre la désinformation. Un rapport complet devra être remis au CSA chaque année. Certains réseaux sociaux se sont déjà mis au travail, c'est le cas par exemple de WhatsApp.

Quand la loi s'appliquera-t-elle ?

La loi ne s'appliquera pas à tout moment. Elle sera active uniquement lors de périodes électorales, trois mois avant le premier tour. Les informations considérées comme fausses seront celles “de nature à altérer la sincérité du scrutin”. Les élections présidentielles, législatives, sénatoriales, européennes et les référendums sont concernées.

Qui peut signaler une “Fake News” ?

Les “Fake News” ne pourront pas être signalées par tout le monde. Tout dépend du support de publication. Les internautes n'auront la possibilité d'agir que sur les réseaux sociaux. Ces derniers doivent mettre en place un dispositif simple pour que les internautes puissent signaler des contenus problématiques. Ce sont ensuite ces réseaux sociaux qui avertiront les autorités publiques.

Concernant les informations publiées sur le web, seuls le ministère public, les partis et groupements politiques, les candidats aux élections et “toute personne ayant intérêt à agir” (par exemple les associations) pourront saisir le juge des référés. Ce dernier aura un délai de 48 heures pour se prononcer. Concernant les chaînes de TV étrangères, c'est le CSA qui sera juge grâce à un renforcement de ses pouvoirs.

Quelles conséquences pour les médias ?

C'est le juge des référés qui étudiera tous les signalements de “Fake News”. Ces contenus seront traités comme les contenus pédopornographiques ou faisant l'apologie du terrorisme et des crimes contre l'humanité. La justice pourra demander aux hébergeurs (réseaux sociaux inclus) et aux fournisseurs d'accès à internet (Orange, SFR, Free, Bouygues etc.) de supprimer ou de bloquer les fausses informations. Le média responsable de la diffusion d'une “Fake News” encourt une peine d'un an d'emprisonnemnet et 75 000 euros d'amende.

Les chaînes TV étrangères seront quant à elles soumises au jugement du CSA. Ce dernier voit ses pouvoirs renforcés. Il pourra suspendre “pendant un mois au plus” la diffusion d'une chaîne “contrôlée par un Etat étranger ou placée sous son influence” (vous avez dit Russie ?). La suspension sera décidée si la chaîne diffuse de fausses informations avec la volonté de troubler l'élection et ce dans les trois mois qui précèdent le premier tour. Si cela est nécessaire, le CSA peut rompre définitivement la convention de diffusion de la chaîne.

Voir les commentaires
Ailleurs sur le web