Malgré 35 000 plaintes, Airbnb ne cherche pas à protéger ses clients des caméras cachées
Airbnb dévoile le nombre de plaintes qu'il a reçu à propos de la présence de caméras cachées dans les locations. Malgré un chiffre impressionnant, 35 000, une enquête montre comment la firme cherche à étouffer ces affaires.
“Il ne s'agit pas de mon numéro de sécurité sociale ou de mon adresse mail. Il s'agit de mon corps nu“, témoigne une femme qui a tenu à rester anonyme. Elle a vécu la même chose que des milliers d'autres victimes, sachant que beaucoup ne sont probablement pas au courant : elle a été filmée à son insu par une caméra cachée placée dans un logement en location sur Airbnb. Ce fléau existe depuis des années. Il y a 5 ans déjà, nous vous expliquions comment repérer une caméra espion avec votre smartphone dans un appartement ou une maison réservée via le site.
Les choses ont très peu évoluées depuis. Suite à la demande d'un tribunal américain, on sait désormais combien de plaintes internes cela représente : 35 000 en 10 ans. Cela en fait presque 10 par jour, tous les jours. Airbnb précise qu'une plainte peut être comptabilisée plusieurs fois, mais n'a pas donné le chiffre de tickets uniques. Les gens se sont vus filmés en train de se changer, de prendre une douche, ou en plein ébat amoureux. Dans certains cas, des enfants sont concernés, au moment du bain par exemple.
Airbnb a enregistré 35 000 plaintes de clients concernant la présence de caméras cachées dans les logements
Un porte-parole d'Airbnb explique qu'en cas de plainte à propos d'une caméra caché, l'entreprise prend “des mesures rapides et appropriées, qui peuvent aller jusqu'à la suppression des hôtes et des inscriptions qui enfreignent notre politique“. Il rappelle également que “les politiques de confiance et de sécurité d'Airbnb sont à la pointe du secteur de la location de vacances et comprennent la vérification des antécédents des hôtes et des invités basés aux États-Unis“.
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Sauf que ces mêmes politiques précisent aussi que les clients ne doivent pas se baser sur ces vérifications pour identifier “toutes les condamnations pénales antérieures ou les enregistrements de délinquants sexuels […] ou d'autres signaux d'alerte“. Pire : des condamnations pour “meurtre, terrorisme, viol ou pédophilie” ne sont pas des critères pour interdire à quelqu'un de proposer son logement à la location sur la plateforme aux États-Unis. Autant dire que ces règles n'ont aucune utilité.
Airbnb ne veut pas que ces affaires s'ébruitent et fait tout pour les étouffer
Si de temps en temps, nous entendons parler de cas d'espionnage par caméra cachée, il faut savoir que l'immense majorité reste secrète. Airbnb fait tout pour régler ça en interne, sans faire de vague. Un employé révèle ainsi que lorsqu'une plainte est reçue à ce propos, la firme ne prévient pas les autorités. Elle peut en revanche contacter le propriétaire incriminé qui aura alors tout le temps de supprimer les preuves après avoir nié les accusations.
C'est ce qui a failli arriver à David Wyzynajtys et sa petite amie en 2021. Après avoir remarqué la présence d'une caméra espion dans une maison texane louée via Airbnb, ils demandent à être rappelés par le service client. Personne ne le fait, et à la place ils reçoivent un message directement sur le site : “Cela ne vous dérange pas si nous contactons l'hôte pour avoir sa version des faits ?“. Le couple refuse et prévient la police qui perquisitionne la maison de l'accusé. 2 000 images volées ont été retrouvées et l'homme a été condamné.
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La plupart du temps, Airbnb trouve un accord avec les plaignants sans passer par la justice, tout en leur faisant signer une clause de confidentialité qui leur interdit de parler de ce qu'ils leur est arrivé ou de la compensation. En mars 2024, la plateforme prend une décision radicale pour mettre fin au problème : il interdit la présence de caméra de surveillance dans les logements mis en location. Une règle qui va dans le bon sens, mais beaucoup doute de son efficacité dans la mesure où la firme ne dit pas comment elle compte forcer les propriétaires à la respecter.
Source : CNN