Test Call of Duty Modern Warfare 3 : une campagne d’un ennui mortel
- Des cinématiques de belle qualité
- La technique, propre et soignée dans l'ensemble
- Toujours de bonnes sensations de tir
- Une IA catastrophique
- Un scénario ultra-convenu, un antagoniste accessoire
- Un manque de rythme et de mise en scène flagrant
- Les missions "ouvertes", la pire idée jamais introduite dans une campagne COD
- Beaucoup d'armes viennent de MW2
- Plus court, tu meurs
- Une extension déguisée vendue 70 €
Seulement un an après la sortie de Call of Duty Modern Warfare 2, la franchise phare d'Activision accueille un nouvel épisode : Modern Warfare 3. Sous ses airs d'opus premium se cache en réalité une extension vendue au prix fort. Le titre, réalisé par Sledgehammer Games, affiche les stigmates d'un développement chaotique, à commencer par sa campagne solo totalement ratée.
Depuis la sortie du 1er Call of Duty en 2003, les campagnes solo de la saga ont toujours été la promesse de moments épiques et héroïques, parfois surréalistes et surtout immersifs. Jouer à une campagne d'un Caloffe, c'est comme s'installer dans des montagnes russes qui filent à toute allure durant 6 à 7 heures.
Dans cet art, Infinity Ward reste le maître incontesté et a proposé sans aucun l'ombre d'un doute les meilleures campagnes de la licence. Celle de Modern Warfare 2, opus sorti en novembre 2022, reste encore dans la mémoire des joueurs pour son intensité, son écriture et ses situations variées. Sans jamais vraiment égaler les productions du studio fondateur, Treyarch a su trouver son style et son public avec les Black Ops, en optant notamment pour une violence débridée.
Quant à Sledgehammer Games, la 3e équipe en charge de la licence, elle s'est au fil des années taillé une réputation de bouche-trou dans le calendrier des sorties annuelles. Il faut bien reconnaître que les différents épisodes développés par les californiens, à savoir Advanced Warfare, WW2 et Vanguard, ont reçu un accueil timoré de la part de la critique et du public.
La pire campagne COD jamais réalisée
Un an après le succès de Modern Warfare 2, c'est donc Sledgehammer Games qui a eu la mauvaise surprise (nous y reviendrons plus tard) de lancer Modern Warfare 3 le 10 novembre 2023 sur PS5, Xbox Series X/S et PC. Après avoir parcouru le mode Histoire dans son intégralité, nous pouvons l'assurer : il s'agit de la pire campagne solo jamais réalisée pour un Call of Duty.
Pourtant, la première mission laisse augurer le meilleur. Dans la peau d'un commando russe, vous attaquez le fameux “Goulag” bien connu des joueurs de Warzone pour faire évader le terrible Makarov, le grand méchant de cet épisode. On retrouve dans cette introduction ce qui fait le sel des campagnes Call of Duty : des évènements scriptés impressionnants, une immersion à toute épreuve, la tension des affrontements… En bref, on est bien devant un spectacle hollywoodien.
A ce moment précis, on se dit que la campagne pourrait bien tenir toutes ses promesses… C'était sans compter l'introduction dès le 2e niveau de la fausse bonne idée de cet épisode : les missions “Feu à volonté”. Derrière cette appellation se cachent des missions “ouvertes”, durant lesquelles le joueur devra réaliser des objectifs ennuyeux à souhait (poser des balises sur des conteneurs, détruire des hélicoptères, obtenir une carte d'accès sur un garde, etc.) en adoptant l'approche de son choix.
Sur le papier, l'idée est séduisante. Seulement, son application est catastrophique et tue ce qui faisait la signature des campagnes COD. En plus de proposer un level design d'une pauvreté confondante (à l'exception de la mission Gratte-ciel), une IA d'une stupidité jamais vue dans la série et une mise en scène réduite à néant, on a l'impression que ces missions sont juste un prétexte pour intégrer au forceps les mécaniques de Warzone et DMZ.
Un mode Warzone/DMZ déguisé
Pour cause, on retrouve tous les systèmes des modes Battle Royale et Extraction : des plaques d'armures, des séries de points comme des drones ou des bombardements furtifs, et même des coffres à ouvrir pour récupérer de l'équipement… Résultat, l'immersion en prend un sacré coup. Prenons un exemple, lors de la 3e mission, vous incarnez Farah et vous devez poser des balises sur trois conteneurs dans un port industriel rempli d'ennemis. L'infiltration est donc de mise, sous peine de se retrouver avec une armée sur les bras. Mais comment rester discret lorsque trois coffres sur 4 vous proposent des armes de destruction massive sans silencieux (on peut littéralement trouver un sniper avec des balles explosives sur le toit de la capitainerie).
Ce schéma se reproduit sur chaque mission ouverte de la campagne. On va essayer de jouer furtivement quelques minutes, avant qu'une IA nous repère à 250 mètres et déclenche la 3e guerre mondiale. A ce moment-là, vous ne contrôlez plus rien et des dizaines d'ennemis convergent tous vers votre position exacte en un temps record. Alors on va chercher cette vilaine AK-47 en or trouvé plus tôt dans un coffre avant de dessouder des soldats par douzaine.
C'est ici que le jeu se transforme en shooter décérébré, la mise en scène hollywoodienne en moins. Finalement, on se surprend à vouloir expédier au plus vite ces phases de gameplay laborieuses en allant droit vers l'objectif sans chercher à comprendre… Dans l'espoir de retrouver une mission scriptée au niveau suivant.
Malheureusement pour le joueur, les quelques missions linéaires proposées ne rattrapent pas ce tableau peu reluisant. Loin d'égaler la puissance ou l'intensité de celles de MW2, elles manquent clairement de rythme, de mise en scène et d'idées de gameplay. En témoigne la mission finale, expédiée à la vitesse de l'éclair… Mis bout à bout, ces multiples défauts expliquent la durée de vie ridicule de la campagne. Il nous a fallu seulement 4h30 pour voir la fin de l'aventure, un record dans l'histoire de la franchise. Et encore, vous pouvez réduire ce chronomètre selon votre manière d'aborder les fameuses missions ouvertes, puisqu'en fonçant dans le tas, on peut les terminer en quelques minutes seulement.
L'origine du fiasco
Comment expliquer un tel fiasco ? Le journaliste réputé Jason Schreier a donné sur le site Bloomberg quelques éléments de réponse. Tout d'abord, cet épisode aurait été réalisé en seulement un an et demi, au lieu du cycle habituel de trois ans. Selon des sources en interne relayées par le journaliste, Sledgehammer travaillait à l'origine sur une suite d'Advanced Warfare avant d'être finalement débauché pour développer ce MW3. A l'origine pensé comme une extension pour Modern Warfare 2, le projet s'est finalement transformé en un épisode à part entière courant 2022, sur décision d'Activision.
Résultat, les californiens se sont retrouvés avec 16 mois devant eux pour développer cette campagne, ainsi que le mode multijoueur (Treyarch étant chargé du nouveau mode Zombi en monde ouvert). Forcément, avec un délai aussi court, la cadence est devenu infernale pour les employés de Sledgehammer, qui ont été contraints de travailler les nuits et les week-ends pour terminer le jeu. Certains ont d'ailleurs avoué à Jason Schreier qu'ils se sentaient trahis par Activision. Après le développement chaotique de Vanguard (réalisé en un temps record lui aussi), l'éditeur américain avait promis aux équipes de ne pas revivre un calendrier aussi serré sur leur prochaine production. Une promesse non-tenue comme on peut le constater.
Précisons que ce 9 novembre 2023, le PDG de Sledgehammer Games Aaron Halon a fait une déclaration sur X pour réfuter les informations partagées par Jason Schreier : “Nous avons travaillé dur pour concrétiser cette vision qui a pris des années de développement. Tout ce qui dit le contraire est tout simplement faux : c'est notre jeu et nous avons hâte d'y jouer en ligne à vous”, écrit le patron du studio.
Call of Duty Modern Warfare 3 est le parfait exemple d'un jeu bâclé et développé à la va-vite. La campagne, une composante pourtant essentielle de la licence, fait peine à voir. Les missions ouvertes flinguent le rythme de cette aventure solo en proposant des phases de gameplay sans intérêt qui ressemblent plutôt à un copier-coller des mécaniques de Warzone et DMZ. D'un ennui désespérant, le joueur se mettra généralement en mode automatique pour parcourir ces niveaux sans âme, mous du genoux et répétitifs à mourir. Avis aux fans des campagnes solo de Call of Duty, passez votre chemin, sous peine d'être terriblement déçus.
- Des cinématiques de belle qualité
- La technique, propre et soignée dans l'ensemble
- Toujours de bonnes sensations de tir
- Une IA catastrophique
- Un scénario ultra-convenu, un antagoniste accessoire
- Un manque de rythme et de mise en scène flagrant
- Les missions "ouvertes", la pire idée jamais introduite dans une campagne COD
- Beaucoup d'armes viennent de MW2
- Plus court, tu meurs
- Une extension déguisée vendue 70 €