Test Super Mario Bros Wonder : Nintendo fait une dernière fleur à la Switch

Notre avis

Invité inattendu du planning 2023 de Nintendo, Super Mario Bros Wonder avait séduit dès sa toute première présentation en juin dernier : gameplay plein de surprises, direction artistique audacieuse, soin du détail bluffant… les promesses du constructeur japonais laissaient augurer du meilleur, mais restait à voir si ce nouveau Mario en avait dans le ventre sur la durée.

Un mois et demi après la sortie d’un The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom que tout le monde imaginait constituer le chant du cygne d’une Switch en fin de vie, Nintendo a une nouvelle fois surpris son monde en annonçant Super Mario Bros Wonder, que personne n’attendait. De toute évidence, la console hybride en avait encore sous le capot, au point de nous offrir une sorte de second reboot de sa plus célèbre licence pour lui offrir des adieux en fanfare.c

En effet, ce n’est pas la première fois que Nintendo donne une seconde jeunesse à Super Mario Bros. En 2006, un certain New Super Mario Bros avait déjà joué ce rôle sur Nintendo DS, modernisant le concept du platformer en deux dimensions auquel le plombier moustachu avait donné ses lettres de noblesse vingt ans plus tôt. Assez vite usé jusqu’à la corde, le style “New SMB” n’a en effet plus été utilisé depuis fin 2012 et un titre de lancement sur Wii U, honnête mais sans génie. Super Mario Maker prendra ensuite le relais dans la grande famille des Mario en 2D, laissant supposer que Nintendo ne concevrait plus jamais d’épisode original sous cette forme… pour mieux nous surprendre avec l’annonce de Super Mario Bros Wonder.

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Mario en pattes d'eph

Ce qui étonne le plus avec ce nouveau Mario, c’est sa patte graphique. Après des années de ronronnement, sans audace aucune, exploitant une identité visuelle efficace mais redondante, Nintendo a décidé de tout chambouler avec un titre à la direction artistique complètement folle. Qualifié par les uns de “Mario sous LSD”, de trip psychédélique par d’autres, Super Mario Bros Wonder fait un usage totalement différent des couleurs vives et chatoyantes qui caractérisaient jusqu’ici l’univers de la licence. Avec ce nouveau Mario, c’est à un véritable kaléidoscope imprévisible que nous avons droit, où tout semble possible, et où jamais rien ne peut être deviné en avance.

Porté par un style hors du commun, jamais vu dans l’histoire de la licence, le tout dernier jeu de Nintendo nous fait voyager à travers sept mondes d’apparence assez classique (plaines, désert, cavernes, fonds marins…) mais systématiquement innovants. La richesse des décors est stupéfiante, tout comme cette étonnante cohérence d’ensemble, sacrément délicate à assurer pour un jeu aux ambitions aussi folles. Le Royaume des Fleurs, nouveau pays imaginaire qui nous fait enfin visiter autre chose que celui des Champignons, est un monde fascinant dont chaque contrée offre son lot d’expériences rafraîchissantes, et où quasi aucun niveau ne ressemble à un autre.

Super Mario New World

Dans ce tout nouvel univers, les mondes ne doivent nécessairement être explorés dans l’ordre dans lequel ils sont numérotés, et il en va de même pour tous les stages que l’on débloque. Tant que l’on a accumulé assez de graines prodiges, on peut déverrouiller l’accès à certains niveaux, et ainsi de suite. Par ailleurs, ces derniers savent se renouveler même en termes de concept, ne se limitant pas au déroulement traditionnel. On trouvera des combats en arène contre les meilleurs représentants d’un bestiaire original et enfin renouvelé, des énigmes pour se triturer la cervelle ou encore des défis permettant de maîtriser les badges. Cette mécanique de gameplay, qui donne un (très) petit aspect light-RPG au titre, est aussi intéressante que frustrante : si elle permet de diversifier la jouabilité et de la personnaliser en fonction des préférences du joueur, l’impossibilité de combiner deux badges constitue clairement un de nos grands regrets, et c’est encore plus frustrant en multijoueur (voir plus bas).

Le jeu propose aussi des “intermèdes” musicaux sans aucun challenge mais qui ont le mérite de mettre en avant une autre facette déroutante de Super Mario Bros Wonder : sa bande originale, débridée et terriblement inspirée, qui pour une fois ne tape que très peu dans la redite. À l’instar d’un Tears of the Kingdom, les hommages aux thèmes cultes de la franchise sont rares et surtout, souvent subtils : seuls les plus gros fans et les fervents mélomanes les remarqueront, dans un élan de surprise mêlée de satisfaction façon Leonardo di Caprio dans Once Upon a Time in Hollywood. D’ailleurs, à plusieurs reprises, le titre se permet des séquences mêlant plate-forme et musique, où les PNJ et autres ennemis dansent en rythme, dans un style qui n’est pas sans rappeler l’excellent Rayman Legends. D’une manière générale, Nintendo semble avoir pas mal examiné ce que les héritiers de Mario ont fait de mieux depuis 10 ans pour améliorer sa propre formule.

Flower Power

Une autre partie du charme de Super Mario Bros Wonder réside dans une des spécificités de ce tout nouvel univers fait de fleurs. En cherchant à donner davantage de personnalité et de chaleur à son lore, Nintendo a frappé fort avec les fameuses fleurs cancan, qu’Internet adore détester. Ces fameuses fleurs présentes tout au long de l’aventure font office à la fois de PNJ récurrents et de précieux alliés brisant quelque peu le quatrième mur. Sans jamais assister le joueur à l’excès (n’est-ce pas Aloy et Atreus ?), elles formulent des commentaires très variés et toujours en rapport avec la situation au passage de votre personnage, doublés dans de nombreuses langues dont le français, qui rendent la situation souvent amusante et surtout plus vivante. Jouer à un jeu Super Mario n’a jamais été aussi immersif, et honnêtement, alors que nous envisagions initialement de réduire ces fleurs au silence (puisque le jeu le permet), nous avons apprécié l’aventure en leur compagnie, et nous vous déconseillons même de les faire taire tant leur apport est plaisant et – encore une fois – plein de surprises.

Vous l’aurez compris, dans Super Mario Bros Wonder, le dépaysement est total, et quasi permanent. Durant notre aventure, très peu de niveaux nous ont paru trop classiques, sauf peut-être à la rigueur au cours d’une dernière ligne droite un peu moins inspirée que le reste. Dans l’ensemble, le sentiment de déjà vu est quasi absent de ce jeu aux innombrables coups de théâtre, qui respecte avec un soin édifiant le slogan affiché sur ses publicités – “Attendez-vous à l’inattendu”. Il faut en effet le reconnaître : au cours d’une quinzaine d’heures de jeu, les surprises ont été innombrables, et nous préférons vous laisser le plaisir de découvrir par vous-mêmes la quantité astronomique d’idées farfelues (et ingénieuses !) que Nintendo a glissées dans cette petite cartouche.

Easy mode

Attendez, comment ça, “une quinzaine d’heures” ? Oui, c’est un peu court, et c’est probablement un des seuls points sur lesquels Super Mario Bros Wonder peut éventuellement décevoir. Bien sûr, cela va grandement dépendre de votre expérience de la série et de ce que vous attendez d’un jeu de ce genre, mais nous sommes obligés de reconnaître une petite pointe de frustration après avoir trop rapidement terminé cette aventure complètement folle. Comme tout jeu vidéo réussi et terriblement addictif, Super Mario Bros Wonder donne envie d’enchaîner les niveaux, de tout explorer, et comme il manque hélas cruellement de challenge pour quiconque a déjà joué à quelques Mario en 2D, l’aventure se plie vraiment vite. Et on parle d’une quinzaine d’heures… pour tout débloquer à 100% ou presque.

Si ces chiffres ne veulent pas dire grand-chose pour vous, voici deux éléments de comparaison plus parlants. Qu’il s’agisse de juste le terminer ou bien de le compléter à 100%, la durée de vie constatée pour ce nouveau Mario est en tous points comparable à celle de New Super Mario Bros et inférieure de plusieurs heures à celle de New Super Mario Bros U. Le contenu “post-game” (niveaux bonus non requis pour terminer le jeu et d’une difficulté bien plus élevée), souvent très riche dans les jeux Mario, est ici très intéressant et offrira à peu près le seul challenge du jeu, mais s’avère lui aussi trop court.

Very Good Trip

Qu’on se rassure néanmoins : si Super Mario Bros Wonder se finit un peu trop vite, ce n’est que pour deux (bonnes) raisons. D’abord, nous insistons clairement sur le fait que votre expérience des jeux du genre a une certaine incidence sur sa durée de vie. Les joueurs rompus aux joutes des Mario en 2D le dévoreront avec, peut-être, une insolente facilité. Reste qu’ils s’en régaleront sans l’ombre d’un doute, tant l’aventure proposée est dépaysante et addictive, à l’image des pouvoirs mystérieux des fleurs prodiges qui offrent un trip hallucinogène dont on redemande à chaque stage avec délectation. Quant à ceux moins habitués au genre, il y a fort à parier qu’ils prendront encore plus de temps (et de plaisir) à arpenter les dizaines de stages fabuleux que propose Super Mario Bros Wonder, bloquer sur la localisation bien cachée de certaines sorties alternatives, réfléchir aux bons builds convenant le plus en fonction des situations…

Enfin, pour celles et ceux qui galèrent trop, le jeu de Nintendo propose un mode facile qui ne dit pas son nom avec des personnages (presque) immortels : Yoshi et Carottin. De quoi traverser le Royaume des Fleurs en toute quiétude s’ils sont un peu rebutés par le concept de plate-forme 2D, mine de rien de plus en plus associé au hardcore gaming – entre die & retry, speedrun et scène indépendante. Et puis, dans le pire des cas, pour s’entraider, il reste le multijoueur aux nombreuses facettes, jusqu’à 4 en local comme en ligne. Le mode en ligne mise également sur d’ingénieuses fonctionnalités asynchrones pour s’entraider sans agir directement (qui a dit “comme Death Stranding” ?). Seul bémol, si bien sûr c’en est un pour vous : finies les collisions entre joueurs sur le même écran, vous ne pourrez plus pousser vos camarades de jeu dans le vide. Enfin, on peut vaguement regretter de ne pas pouvoir combiner les badges à plusieurs, afin que chacun ait son rôle… mais si on en arrive à se plaindre de quelque chose d’aussi insignifiant, c’est bon signe pour le reste.

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Super Mario Bros. Wonder (SWITCH)
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Notre Verdict

C’est une quasi certitude : Super Mario Bros Wonder sera un des derniers jeux inédits de la Nintendo Switch, et il y a fort à parier qu’il en sera le dernier grand jeu. Porté par une harmonie formidable entre sa direction artistique complètement dingue (et maîtrisée !), sa jouabilité toujours aussi précise et efficace, et une capacité de renouvellement surprenante et jamais vue dans de telles proportions, il est assurément l’un des tous meilleurs jeux de la licence, et probablement le meilleur disponible à ce jour en deux dimensions. Si l’on peut à la rigueur regretter sa trop grande facilité et sa durée de vie un peu faiblarde, il fera assurément le bonheur de plusieurs générations de fans du plombier. Bref, encore un indispensable sur une console qui n’en manque décidément pas.

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