Tous les sites de ventes en ligne manipulent les consommateurs selon ce rapport, mais comment ?
Une étude de l'UFC-Que Choisir montre comment les sites de ventes en ligne utilisent des “dark patterns” pour manipuler les clients lors de leurs achats. Comment se manifeste ces pratiques interdites par la réglementation européenne ?
Vous surfez sur un site de vente en ligne à la recherche d'un article. Sur la page des résultats, vous tombez sur un modèle qui affiche “plus de 20 000 vendus dans les dernières 24h” ainsi que “derniers exemplaires en stock“. Vous vous dites que le produit est sûrement de qualité et qu'il serait bête de passer à côté, alors vous passez à la caisse.
Si cela vous est déjà arrivé, sachez que vous avez été victime de “dark patterns“, ou procédés manipulatoires. Ce sont les techniques mises en œuvre par les sites pour influencer vos comportements d'achats, entre autres. Ils peuvent aussi être utilisés pour vous faire payer une option dont vous ne voulez pas ou fournir des données personnelles aux partenaires de la plateforme.
En Europe, le Digital Services Act interdit ces pratiques et la France applique ce texte depuis février 2024. Pourtant, un rapport de l'UFC-Que Choisir montre une réalité accablante : les 20 sites de vente en ligne les plus fréquentées dans le pays se servent tous d'au moins un “dark pattern”. C'est Vinted qui s'en sort le mieux avec 2 procédés repérés “seulement”. En tête du classement, on trouve Temu, premier avec 11, puis AliExpress, Amazon et Veepee à égalité avec 10.
Les sites de ventes en ligne utilisent des “dark patterns” pour influencer nos achats, l'UFC-Que Choisir détaille leurs méthodes
En vous rendant sur Temu lorsque des promotions sont en cours, vous constaterez que le prix initial est barré, mais que le prix après remise ne l'est pas. À la place, on voit “???” et il faut ajouter l'article au panier pour découvrir le tarif. De son côté, AliExpress choisit de dissimuler les publicités dans ses résultats en rendant la mention “Annonce” difficilement repérable. Le site affiche aussi des affirmations impossibles à vérifier comme “+ 10 000 vendu(s)“.
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La plateforme française Veepee se démarque par une manière confuse de vous demander si vous souhaitez ou non partager vos données avec ses partenaires et recevoir des mails commerciaux. Au lieu d'une case, il y en a deux, et la formulation fait qu'il faut décocher la première puis cocher la seconde. Si l'on s'intéresse à Amazon, on peut voir que le site se sert, par exemple, des messages de temps limité. Ce sont ces cases souvent rouge disant “Offre à durée limitée” sur un article en promotion, mais sans donner de date de fin.
Il existe de nombreux procédés manipulatoires, mais les consommateurs peuvent apprendre à les repérer
Sans le savoir, nous sommes confrontés à tout un tas de “dark patterns” tels que définis par le DSA, mais pas que. Certains sont très courants et pourtant, ce sont bien des “astuces” pour jouer sur nos biais cognitifs inconscients et orienter nos comportements. On peut citer :
- Les manipulations sensorielles : des éléments “visuels, sonores ou tactiles” nous influencent par des mises en valeur sélectives. L'exemple le plus connu est un bouton coloré pour accepter une option supplémentaire, à côté d'un autre plus terne pour la refuser.
- Les coûts cachés : le prix final d'un article n'est pas affiché d'emblée, ce qui rend les comparaisons difficiles. Leboncoin procède ainsi par exemple, en ajoutant des frais supplémentaires obligatoires uniquement dans le panier.
- L'obligation de créer un compte : ça, vous l'avez forcément vécu. Alors même que ce n'est pas nécessaire, des sites vous forcent à créer un compte (et donc donner des informations personnelles) pour finaliser la transaction.
- Le sludge : derrière ce terme se cache les obstacles arbitraires ajoutés à une interface pour empêcher l'internaute de faire un choix facilement. On pense aux cas où l'on peut accepter une option payante en un clic, mais la refuser uniquement après plusieurs étapes.
Il y a d'autres procédés expliqués dans le rapport de l'UFC-Que Choisir. L'association l'a d'ores et déjà transmis à la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) et à la Commission européenne. Elle “ne manquera pas d’agir en justice en cas de persistance de telles pratiques.“