Voitures électriques : l’Europe doit changer sa stratégie si elle veut rester dans la course
Face aux échéances fixées par l'Union européenne, comme l'interdiction de la vente des voitures thermiques, développer la production de batteries du Vieux continent est devenu un enjeu vital. Et de l'avis de la Cour des comptes européennes, l'Europe doit impérativement revoir sa stratégie si elle veut rester dans la course.
Comme vous le savez probablement, l'Europe a fixé des objectifs ambitieux concernant l'électrification du Vieux Continent, à commercer par la fameuse interdiction de la vente de voitures thermiques dès 2035.
Même si l'Allemagne est parvenue à obtenir des modifications du texte en faveur des carburants synthétiques, le développement de la production de batteries en Europe est devenu de facto un enjeu vital pour les 27.
Un nouvel élan stratégique nécessaire
Dès 2018, la Commission européenne a partagé une feuille de route détaillée pour la fabrication de batteries. Et près de 5 ans plus tard, la Cour de comptes européenne a décidé de faire le point sur ce plan d'action. A l'heure où la production mondiale de batteries se concentre majoritairement en Chine, l'institution estime qu'il est nécessaire d'apporter “un nouvel élan stratégique”.
Pour ce faire, la Cour des comptes européenne a examiné les objectifs stratégiques et les moyens d'intervention établis dans le plan d'action de 2018, ainsi que les progrès réalisés pour le mettre en oeuvre. En outre, l'institution a analysé la capacité, actuelle et provisionnelle, de production de batteries de l'UE, ainsi que les risques auxquels cette capacité pourrait être exposée.
Une trop grande dépendance des pays étrangers
Tout d'abord, la Cour des comptes européenne pointe du doigt la trop grande dépendance de l'UE des pays étrangers concernant l'approvisionnement en matières premières. Pour preuve, 78% du cobalt, du nickel, du lithium, du manganèse et du graphite naturel, soit les terres rares utilisées dans la fabrication de batteries, proviennent de l'étranger.
“Environ 87 % du lithium brut, 68 % du cobalt brut, 41% du manganèse et 40 % du graphite naturel brut sont importés d'un seul pays”, alerte la juridiction. Selon la Cour des comptes, cette forte dépendance pourrait aboutir d'ici 2030 à une pénurie de matières premières pour les batteries (que ce soit pour des raisons économiques ou géopolitiques).
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“Cela s'explique par les effets conjugués de l'augmentation de la demande mondiale, principalement due à l'électrification du transport routier, et de l'approvisionnement limité en matières premières provenant de l'UE, caractérisé à la fois par son insuffisance et par son manque de souplesse”, explique le rapport.
Revoir la réglementation pour séduire les constructeurs de batteries
De fait, la Cour des comptes estime que l'UE doit revoir sa réglementation pour rester compétitive et pour inciter les constructeurs de batteries à s'installer en Europe. Sur ce point, les Etats-Unis ont mis en place des séries de subventions et d'allègements fiscaux pour séduire les entreprises, un exemple à suivre selon l'institution.
Si rien n'est fait, une telle pénurie de matières premières pourrait fatalement aboutir à une augmentation drastique du coût des voitures électriques en Europe. A ce sujet, de nombreux constructeurs n'ont pas attendu les conclusions de la Cour des comptes pour trouver des solutions pour faire baisser les prix. C'est le cas de Renault avec sa nouvelle R5 électrique. Pour passer sous la barre symbolique des 25 000 €, la marque au losange veut opter pour une nouvelle plateforme, la CMF-BEV, mais aussi pour un nouveau combo moteur-batterie qui ne nécessite pas de terres rares pour sa fabrication.
L'UE doit fixer des objectifs de production chiffrés et quantifiés
Enfin, la Cour des comptes regrette que la Commission européenne n'ait pas fixé de valeurs cibles quantifiées assorties d'échéances dans son plan d'action de 2018. En n'estimant pas le niveau de production de batteries à atteindre pour réaliser le double objectif de neutralité carbone, les chances de ne pas attendre l'objectif zéro émission fixé en 2035 sont fortes.
Dans la synthèse de son rapport, voici les recommandations partagées par la Cour des comptes européenne :
- mettre à jour le plan d'action stratégique pour les batteries en accordant une attention particulière à la sécurisation de l'accès aux matières premières
- renforcer le suivi au moyen de données régulières, actualisées et complètes
- améliorer la vue d'ensemble des financements de l'UE en faveur de la chaîne de valeur des batteries
- améliorer la coordination et le ciblage des financements de l'UE en faveur de la chaîne de valeur des batteries
- veiller à ce que tous les participants à des projets importants d'intérêt européen commun concernant les batteries disposent d'un accès équitable au soutien financier public
Si l'on en croit la Cour des comptes donc, il reste donc beaucoup de travail à l'Europe si elle souhaite rester dans la course de l'électrique et être au rendez-vous des objectifs fixés.
Source : Cour des comptes européenne