Youtube : une association dénonce le travail illicite des enfants en version 2.0
Au fil des années Youtube s’est professionnalisé. Youtubeur est devenu un vrai métier, une industrie entière s’est construite autour de cette activité. La “Youtube Money” attire de plus en plus d’acteurs. Parmi eux, certains parents mettent en scène leurs enfants dans des vidéos qui cartonnent. Mais rien n’assure que les revenus leurs sont reversés. Assistons-nous à l’exploitation des enfants en version 2.0 ?
Que ce soit pour se divertir, s’informer, apprendre, Youtube est devenue une plateforme de référence. Le service de vidéos de Google enregistre chaque jour des milliards de vue. Sans surprise, de plus en plus d’acteurs veulent tenter leur chance. Les youtubeurs stars mettent des étoiles plein les yeux. Devenir millionnaire en quelques années, ça donne envie. Et même si tout le monde n’atteint pas ces sommets, vivre de ses vidéos Youtube n’est pas inaccessible. Youtubeur est devenu un métier à part entière.
Parmi les plus friands de vidéos Youtube, on retrouve les enfants. Et qui de mieux que les enfants pour parler à d’autres enfants ? Certains parents et certaines marques l’ont bien compris et ont flairé ce business juteux. En 2018, des milliers de chaînes Youtube mettent donc en scène des bambins qui parlent de tout et de rien : jouer à jardiner, construire un château de princesse, tester un jouet… Ces chaînes comptent des millions d’abonnés, font parfois plusieurs millions de vue, et engrangent donc de jolies sommes d’argent. Jusqu’à 10 000 euros pour une vidéo qui dépasse les 11 millions de vues. Un enfant a même récolté 11 millions de dollars. Certaines marques n’hésitent pas non plus à sponsoriser des contenus pour placer leurs produits dans les vidéos. Le modèle économique est exactement le même que sur les chaînes où des adultes se mettent en scène.
Youtube : les enfants stars ont-ils leur part du gâteau ?
Dans un reportage diffusé sur France 3, l’Observatoire de l’éducation s’inquiète de cette tendance à mettre en scène les enfants. Car dans le Code du Travail, aucune mesure n’encadre cette activité sur internet. Bien souvent, ce sont les parents qui s’improvisent vidéastes. Ce sont eux qui négocient les contrats de partenariat avec les marques. Ce sont eux qui gèrent la fameuse “Youtube Money”. Le problème, c’est que rien ne certifie que les enfants touchent leur part du gâteau. Pourtant, ils combinent bien cette activité à leur emploi du temps d’écoliers. Ils se déplacent par exemple sur des salons avec l’étiquette de “guest”, invités par des marques qui exploitent leur image pour mettre en avant leurs produits.
Le souci majeur vient de la législation. L’activité de “youtubeur” pour un enfant n’est pas reconnue. Contrairement à un enfant star comme “Jordy” à son époque (reconnu comme intermittent du spectacle), leurs revenus ne sont pas bloqués sur un compte à la Caisse des Dépôts et Consignations. Cela signifie que rien n’assure qu’ils toucheront les fruits de leur travail une fois leur majorité atteinte. Le statut de “youtubeur” n’étant pas reconnu, il n’existe aucune mesure d’encadrement concernant les rythmes de tournages. Le Président de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique souhaite donc que les enfants “youtubeurs” soient protégés comme peuvent l’être des enfants chanteurs ou acteurs.
Interrogés par nos confrères de France 3, certaines marques reconnaissent qu’elles ne savent pas si les enfants profitent du fruit de leur travail. Gwénaëlle Davault-Mathieu, directrice adjointe de la communication de Jouéclub, précise que son entreprise fournit des produits mais ne rémunère pas. En revanche, elle admet ne pas savoir si les revenus perçus par les parents sont placés pour les enfants. Sollicités par nos confrères de France 3, les parents des enfants n’ont pas souhaité s’exprimer. “Dur dur d'être bébé”.